Arret Nº 6B 33/2020 Tribunal fédéral, 24-06-2020

Judgement Number6B 33/2020
Date24 juin 2020
Subject MatterInfractions Actes d'ordre sexuel sur une personne incapable de résister; présomption d'innocence; arbitraire
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
6B_33/2020
Arrêt du 24 juin 2020
Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Muschietti.
Greffier : M. Vallat.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Philippe Kitsos, avocat,
recourante,
contre
1. Ministère public de la République et canton de Neuchâtel,
2. B.________,
représenté par Me Richard Calame, avocat,
intimés.
Objet
Actes d'ordre sexuel sur une personne incapable de résister; présomption d'innocence; arbitraire,
recours contre le jugement de la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 4 novembre 2019 (CPEN.2017.92).
Faits :
A.
Le 28 janvier 2015, A.________ a porté plainte contre le Dr B.________, coloproctologue. Ce dernier la suivait régulièrement depuis 2013 ensuite d'une intervention en urgence pour un abcès sous la fesse gauche, avec fistulisation (apparition d'un conduit entre le rectum et l'ancien logement de l'abcès). Il l'avait lui-même opérée à deux reprises pour résection de polypes et marisques péri-anales ainsi que pour le placement d'un drain dans le trajet de la fistule, puis pour le traitement définitif de celle-ci. En substance, la patiente lui reprochait divers attouchements lors de consultations, notamment en novembre 2014 et janvier 2015.
Par acte d'accusation du 2 décembre 2016, il a été reproché au médecin, entre le 21 octobre 2013 et le 3 novembre 2014, d'avoir, en l'absence de résistance de la patiente confiante en l'intérêt médical des examens pratiqués, profité des visites médicales de cette dernière consécutives à une opération chirurgicale dans le dessein de s'exciter sexuellement. Il s'était ainsi placé derrière elle à trois reprises et lui avait palpé les seins à même la peau. Le 11 juillet 2014, il avait fait mettre la patiente entièrement nue, les mains sur la table de consultation, les fesses en arrière, les jambes écartées, pour lui palper les fesses (ch. I.1 à 10). Le 3 novembre 2014, alors que la patiente se trouvait sur une chaise [en position gynécologique], le bas du corps nu, il s'était placé entre ses jambes et avait stimulé son clitoris pendant plusieurs minutes, sous le prétexte médical de vérifier un problème lié à des gaz en stimulant des muscles ou de provoquer un réflexe clitorido-anal, agissant ainsi dans le dessein de s'exciter sexuellement (ch. II.1 à 9). Le 26 janvier 2015, il avait profité de la visite médicale pour faire prendre place à sa patiente sur une chaise de type gynécologique. Sous le prétexte médical de vérifier les suites d'une opération, mais dans le dessein de s'exciter sexuellement, il avait pénétré d'un doigt non ganté l'anus de la victime puis avait collé son propre sexe en érection contre celui de celle-ci, éjaculant finalement notamment sur sa blouse de travail (ch. III.1 à 10).
Par jugement du 21 septembre 2017, le Tribunal de police des Montagnes et du Val-de-Ruz, n'a pas retenu les faits décrits au ch. I de l'acte d'accusation. Suivant la réquisition du ministère public, il a jugé qu'il n'était pas possible de conclure de manière certaine que les actes visés n'étaient pas justifiés médicalement et que l'incapacité de résistance de la victime était douteuse. Il a, en revanche, pour les faits décrits aux ch. II et III de l'acte d'accusation, reconnu B.________ coupable d'actes d'ordre sexuel sur une personne incapable de résistance et l'a condamné à 14 mois de privation de liberté avec sursis pendant 2 ans. Renonçant à prononcer une interdiction de pratiquer la médecine, le tribunal a, en outre, condamné l'intéressé à verser à la partie plaignante 5000 fr. à titre de réparation du tort moral ainsi que 12'701 fr. 90 pour ses dépenses occasionnées par la procédure, frais (14'000 fr.) à charge de l'intéressé.
B.
Saisie d'un appel du condamné (demandant une expertise et concluant à son acquittement) et d'un appel-joint du ministère public, qui requérait le prononcé d'une interdiction de pratiquer la médecine, par jugement d'appel du 4 novembre 2019, la Cour pénale du Tribunal cantonal neuchâtelois, après avoir ordonné la mise en oeuvre d'une expertise complémentaire concernant l'examen du reflexe bulbo-caverneux ou clitorido-anal, a admis l'appel, rejeté l'appel-joint, annulé le jugement de première instance, acquitté le prévenu, rejeté les conclusions civiles de la partie plaignante et alloué à B.________ une indemnité de 40'000 fr. pour ses frais de défense, ainsi que 1000 fr. à titre de réparation de son tort moral, frais à charge de l'Etat.
En bref, ce jugement d'appel, auquel on renvoie pour le surplus, retient, relativement au ch. II de l'acte d'accusation (consultation du 3 novembre 2014), que l'abcès et les interventions chirurgicales consécutives pouvaient être à l'origine d'une incontinence anale, que la partie plaignante avait consulté, notamment le 3 novembre 2014, pour remédier à une telle incontinence aux gaz, qui avait disparu après que le médecin eut adressé sa patiente à une physiothérapeute spécialisée. Lors de cette consultation, le prévenu avait ainsi procédé à une stimulation du clitoris dans le but d'établir la cause de l'incontinence. Un tel test pouvait se justifier selon un expert. Selon la seconde experte, la stimulation avec la main gantée pendant 20 à 30 secondes était un acte médical reconnu. Elle avait décrit cet acte d'une façon compatible avec les explications données par le médecin. Cet acte était ainsi justifié médicalement. La cour cantonale en a déduit que l'intention de commettre une infraction n'était pas prouvée.
Quant au ch. III de l'acte d'accusation (consultation du 26 janvier 2015), la cour cantonale, en l'absence d'autre moyen de preuve et confrontée à deux versions contradictoires qui s'opposaient (celle de la partie plaignante correspondant aux faits décrits dans l'acte d'accusation et celle du prévenu qui niait), a jugé que les déclarations de la plaignante n'étaient pas plus crédibles que celles du prévenu. Ces faits n'étaient donc pas établis, un doute irréductible subsistant quant à savoir si le prévenu s'était excité sexuellement au contact de sa patiente, en profitant de la promiscuité d'un examen médical. Compte tenu de l'ensemble des circonstances, même s'il était possible que le prévenu ait eu l'intention d'exciter la partie plaignante ou de s'exciter lui-même à son contact, le dossier ne le prouvait pas.
C.
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Elle conclut avec suite de frais et dépens, principalement, à sa réforme dans le sens de la condamnation de l'intimé à 14 mois de privation de liberté avec sursis pendant deux ans, pour actes d'ordre sexuel sur une personne incapable de résistance, ainsi qu'à sa condamnation à lui verser 5000 fr. à titre de réparation du tort moral, 12'702 fr. 90 pour les dépenses occasionnées par la procédure de première instance, 3457 fr. 65 pour celles de deuxième instance, respectivement 3819 fr. 70 pour la procédure fédérale. A titre subsidiaire, elle demande l'annulation de la décision querellée et le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants.
Considérant en droit :
1.
Dans le recours en matière pénale, le Tribunal fédéral est lié par...

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