Arret Nº 6B 204/2019 Tribunal fédéral, 15-05-2019

Judgement Number6B 204/2019
Date15 mai 2019
Subject MatterProcédure pénale Droit d'être entendu ; arbitraire (6B_204/2019) ; contrainte sexuelle ; abus de détresse (6B_206/2019)
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
6B_204/2019, 6B_206/2019
Arrêt du 15 mai 2019
Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,
Jacquemoud-Rossari et Rüedi.
Greffier : M. Graa.
Participants à la procédure
6B_204/2019
X.________,
représenté par Me Anne-Laure Simonet, avocate,
recourant,
contre
1. Ministère public de l'Etat de Fribourg,
2. A.________,
intimés,
et
6B_206/2019
Ministère public de l'Etat de Fribourg,
recourant,
contre
X.________,
représenté par Me Anne-Laure Simonet, avocate,
intimé.
Objet
6B_204/2019
Droit d'être entendu; arbitraire,
6B_206/2019
Contrainte sexuelle; abus de la détresse,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, Cour d'appel pénal, du 27 novembre 2018 (501 2017 172).
Faits :
A.
Par jugement du 19 janvier 2017, le Tribunal pénal de l'arrondissement de la Gruyère a condamné X.________, pour actes d'ordre sexuel avec des enfants, contrainte sexuelle et tentative de contrainte sexuelle, à une peine privative de liberté de quatre ans.
B.
Par arrêt du 27 novembre 2018, la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal du canton de Fribourg a partiellement admis l'appel formé par X.________ contre ce jugement et a réformé celui-ci en ce sens que le prénommé est condamné, pour actes d'ordre sexuel avec des enfants s'agissant des actes commis entre 2002 et 2005, abus de la détresse concernant les actes commis entre 2010 et 2012 et tentative d'abus de la détresse en raison des actes commis en 2013, à une peine privative de liberté de 30 mois, avec sursis portant sur 24 mois durant trois ans.
La cour cantonale a retenu les faits suivants.
B.a. X.________ et B.________ se sont mariés en 1986. De leur union sont nés A.________, en 1989, puis C.________ en 1991. Le 1er avril 2012, A.________ a quitté le domicile familial. Le 3 mai 2014, alors qu'elle était âgée de 25 ans et avait pris son indépendance depuis plus de deux ans, la prénommée a dénoncé à la police avoir été victime d'attouchements sexuels de la part de son père durant une dizaine d'années.
B.b. A D.________, dans la maison familiale, entre 2002 et 2011, X.________ s'est rendu en moyenne un dimanche par mois dans la chambre de A.________ dans le dessein de lui caresser les parties intimes. Alors que le reste de la famille s'habillait et faisait sa toilette, l'intéressé poussait la porte de la chambre de sa fille sous prétexte de la réveiller et s'asseyait sur le bord du lit pour toucher les seins et le sexe de A.________ à même la peau. Lors de l'une de ces visites, X.________ a tenté d'introduire ses doigts dans le vagin de sa fille. En outre, à un moment indéterminé durant cette période, il a commencé à demander à A.________ qu'elle lui masse le sexe.
B.c. Dès 2009, époque à laquelle X.________ et sa fille avaient congé le vendredi après-midi, le prénommé a profité de l'absence hebdomadaire de son épouse et de son fils pour rejoindre A.________ dans sa chambre. Il caressait cette dernière par-dessus ses habits, avant d'introduire sa main dans son pantalon pour lui toucher le sexe. Occasionnellement, il ouvrait également son propre pantalon pour que sa fille pût glisser sa main dans son slip et lui masser le sexe. A une occasion, alors que A.________ était assise à son bureau, l'intéressé s'est livré aux mêmes caresses avant d'amener sa fille à le masturber jusqu'à éjaculation.
B.d. A E.________, le 3 octobre 2012, au domicile de A.________, X.________ s'est assis à côté d'elle sur le canapé et lui a touché les parties intimes. Bien que A.________ eût ôté la main de son père à plusieurs reprises, ce dernier ne s'est arrêté qu'après un certain laps de temps.
B.e. A D.________, dans la maison familiale, en janvier 2013, X.________ a proposé à A.________ de lui montrer les modifications qu'il avait réalisées dans la cave. Profitant de se trouver seul aux côtés de sa fille, il a tenté de toucher celle-ci, laquelle a réussi à le repousser.
B.f. Durant l'instruction, une expertise psychiatrique portant sur A.________ a été mise en oeuvre. Cette expertise a été réalisée par la Dresse F.________.
Au cours de la procédure d'appel, eu égard aux critiques adressées par X.________ à l'expertise réalisée par la Dresse F.________, une nouvelle expertise psychiatrique portant sur A.________ a été confiée au Dr G.________.
C.
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 27 novembre 2018 (6B_204/2019), en concluant, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens qu'il est acquitté, que les conclusions civiles prises par A.________ sont rejetées, qu'une indemnité de 24'162 fr. 80 lui est allouée pour ses dépens dans la procédure de première instance, qu'une indemnité de 5'000 fr., avec intérêts, lui est allouée à titre de l'art. 429 al. 1 let. c CPP, et qu'une indemnité de 23'776 fr. 15 lui est allouée pour ses dépens dans la procédure d'appel. Subsidiairement, il conclut à sa réforme en ce sens qu'il est condamné, pour actes d'ordre sexuel avec des enfants, abus de la détresse et tentative d'abus de la détresse, à une peine privative de liberté de 18 mois, avec sursis durant trois ans, et qu'une indemnité de 23'969 fr. 45 lui est allouée pour ses dépens. Plus subsidiairement, il conclut à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision après qu'une expertise de crédibilité a été mise en oeuvre.
Le Ministère public du canton de Fribourg forme également un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 27 novembre 2018 (6B_206/2019), en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision.
D.
Invités à se déterminer sur le recours du ministère public, la cour cantonale s'est référée à l'arrêt attaqué, tandis que X.________ a conclu principalement à l'irrecevabilité et subsidiairement au rejet de celui-ci.
Considérant en droit :
1.
Les deux recours en matière pénale au Tribunal fédéral sont dirigés contre la même décision. Ils concernent le même complexe de faits et portent sur des questions juridiques connexes. Il y a donc lieu de joindre les causes et de les traiter dans un seul arrêt (art. 24 al. 2 PCF et 71 LTF).
I. Recours de X.________ (recourant 1)
2.
Le recourant 1 reproche à la cour cantonale d'avoir violé son droit d'être entendu en refusant de mettre en oeuvre une expertise de crédibilité portant sur les déclarations de A.________.
2.1. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure de recours se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. L'art. 389 al. 3 CPP règle les preuves complémentaires. Ainsi, la juridiction de recours administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours. Le droit d'être entendu, consacré par l'art. 107 CPP, garantit aux parties le droit de déposer des propositions relatives aux moyens de preuves (al. 1 let. e). Conformément à l'art. 139 al. 2 CPP, il n'y a pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité ou déjà suffisamment prouvés. Cette disposition codifie, pour la procédure pénale, la règle jurisprudentielle déduite de l'art. 29 al. 2 Cst. en matière d'appréciation anticipée des preuves (arrêts 6B_210/2019 du 27 février 2019 consid. 1.1; 6B_896/2018 du 7 février 2019 consid. 2.1). Le refus d'instruire ne viole ainsi le droit d'être entendu des parties que si l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a procédé, est entachée d'arbitraire (ATF 141 I 60 consid. 3.3 p. 64; 136 I 229 consid. 5.3 p. 236).
Conformément au principe de la libre appréciation des preuves, l'appréciation de la crédibilité des divers moyens de preuve relève en premier lieu de la compétence du juge du fait et aucun moyen de preuve ne s'impose à lui. Le magistrat ne saurait se soustraire à son devoir de libre appréciation en exigeant, sans nuance et quasi automatiquement, qu'une expertise de crédibilité soit ordonnée dès que des déclarations sont contestées, contiennent quelques imprécisions ou des contradictions mineures ou manquent de clarté sur des points secondaires (arrêts 6B_1070/2017 du 20 avril 2018 consid. 2.1; 6B_506/2016 du 22 juin 2017 consid. 1.4.1). Le juge ne doit ainsi recourir à une expertise de crédibilité qu'en présence de circonstances particulières (ATF 128 I 81 consid. 2 p. 86 et les références citées; arrêts 6B_1153/2018 du 14 décembre 2018 consid. 2.7; 6B_1070/2017 précité consid. 2.1). S'agissant de l'appréciation d'allégations d'abus sexuels, les expertises de crédibilité s'imposent surtout lorsqu'il s'agit des déclarations d'un petit enfant qui sont fragmentaires ou difficilement interprétables, lorsqu'il existe des indices sérieux de troubles psychiques, ou lorsque des éléments concrets font penser que la personne interrogée a été influencée par un tiers (ATF 129 IV 179 consid. 2.4 p. 184; 128 I 81 consid. 2 p. 84 ss; 118 Ia 28 consid. 1c p. 31/32).
2.2. La cour cantonale a exposé qu'une expertise de crédibilité portant sur A.________ n'apparaissait pas nécessaire. Il s'agissait d'une femme, âgée de 25 ans lorsqu'elle avait dénoncé les événements faisant l'objet de la procédure, non d'un enfant au discours incohérent. La prénommée souffrait certes d'un état de stress post-traumatique, mais cela n'ôtait rien au caractère compréhensible et cohérent de son discours. Selon l'autorité précédente, il lui appartenait d'évaluer la portée des déclarations effectuées par l'intéressée au cours de la procédure et d'observer dans quelle mesure les propos en question étaient compatibles avec les autres éléments probatoires...

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