Arret Nº 5A_941/2018 Tribunal fédéral, 23-01-2019

Judgement Number5A_941/2018
Date23 janvier 2019
Subject MatterDroit de la famille effet suspensif (droit de visite / garde)
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_941/2018
Arrêt du 23 janvier 2019
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président,
Schöbi et Bovey.
Greffière : Mme Hildbrand.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Matthieu Genillod, avocat,
recourante,
contre
B.________,
représenté par Me Alessandro Brenci, avocat,
intimé.
Objet
effet suspensif (mesures provisionnelles; retrait du droit de déterminer le lieu de résidence et placement des enfants),
recours contre l'arrêt du Président de la Ie Cour d'appel civil du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg du 12 novembre 2018 (101 2018 345).
Faits :
A.
A.a. A.________, née en 1969, et B.________, né en 1973, se sont mariés en 2010. Deux enfants sont issus de leur union, soit C.________ et D.________, nés en 2010 et 2011.
Les époux vivent séparés depuis juin 2014, les enfants étant demeurés auprès de leur mère.
Les modalités de séparation des parties ont fait l'objet de plusieurs décisions de mesures (super-) provisionnelles, notamment s'agissant de la garde des enfants et de l'exercice du droit de visite du père.
A.b. Une procédure pénale a été ouverte contre B.________ en décembre 2015 dans le canton de Vaud après que la mère a fait état de comportements de sa part qu'elle jugeait déplacés puis de possibles abus sexuels envers ses fils. Cette procédure a été classée par ordonnance pénale du 20 mars 2018, confirmée par arrêt du Tribunal cantonal vaudois du 26 avril 2018, faute d'éléments indiquant que les enfants avaient été abusés par leur père, lequel n'avait notamment jamais été mis en cause par ceux-ci. La pédopsychiatre et la psychologue qui suivaient les enfants avaient par ailleurs nié l'existence d'un état de stress post-traumatique et indiqué que les comportements très sexualisés des enfants pour leur âge (dessins comportant des sexes masculins en érection, dévêtissement avec caresses des régions génitale et anale, mimes de l'acte sexuel) pouvaient être liés à une mise en contact trop précoce avec des contenus sexuels comme à une régression liée à une souffrance intense, telle que celle que la séparation très conflictuelle des parents pouvait engendrer chez des enfants.
A.c. Depuis le début de la procédure pénale, le père n'a bénéficié, sur requête de son épouse, que d'un droit de visite restreint, d'abord au sein d'un point rencontre, puis avec l'accompagnement d'un tiers et enfin à raison d'une après-midi par semaine non surveillée.
A.d. Le 17 juillet 2018, B.________ a ouvert une procédure de divorce devant le Tribunal civil de la Broye (ci-après: Tribunal civil) requérant notamment, par voie de mesures provisionnelles, l'élargissement de son droit de visite à un week-end sur deux.
A.e. Le 30 août 2018, l'école fréquentée par les enfants a émis un nouveau signalement au Service vaudois de protection de la jeunesse (ci-après: SPJ) en raison d'inquiétudes sur la situation de ceux-ci, qui avaient un comportement très agité et difficile et présentaient des allusions et gestes à connotation sexuelle trop fréquents pour des garçons de leur âge.
A.f. En audience du 12 octobre 2018, les parties se sont mises d'accord sur l'instauration d'une curatelle éducative et de surveillance des relations personnelles, ainsi que sur la mise en oeuvre d'une expertise pédopsychiatrique et d'une enquête sociale.
A.g. Par " décision partielle " rendue le 26 octobre 2018 dans le cadre de mesures provisionnelles prononcées durant la procédure de divorce, la Présidente du Tribunal civil de la Broye a, entre autres points, retiré provisoirement à A.________ le droit de déterminer le lieu de résidence de ses enfants et ordonné leur placement immédiat par l'autorité de protection de l'enfant compétente, chaque parent bénéficiant d'un droit de visite à raison d'une journée par semaine (samedi ou dimanche).
B.
B.a. Le 6 novembre 2018, A.________ a fait appel de cette décision et sollicité l'octroi de l'effet suspensif.
B.b. Par courrier du 7 novembre 2018, le SPJ est spontanément intervenu pour demander le rejet de la requête d'effet suspensif, relevant notamment que le comportement de la mère - qui alimentait le conflit avec son mari, refusait catégoriquement qu'il puisse exercer son droit de visite non surveillé et divulguait à l'entourage des enfants que ceux-ci auraient été victimes d'abus, allégations pourtant écartées - était de nature à entretenir le fort conflit de loyauté dans lequel ils se trouvaient, de sorte qu'il était urgent de les protéger de ces actes de manipulation et d'aliénation.
B.c. Statuant le 12 novembre 2018, le Président de la I e Cour d'appel civil du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg (ci-après: Président) a refusé l'effet suspensif.
C.
C.a. Par acte du 14 novembre 2018, A.________ interjette un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre cette décision dont elle requiert principalement l'annulation et la réforme en ce sens que sa requête de suspension de l'effet exécutoire de la décision du 26 octobre 2018 est admise; subsidiairement, elle requiert son annulation et le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. Elle requiert également l'octroi de l'effet suspensif pour la procédure fédérale et d'être mise au bénéfice de l'assistance judiciaire.
Des déterminations n'ont pas été requises.
C.b. Le chef du SPJ a adressé un courrier spontané au Tribunal de céans le 26 novembre 2018 dans lequel il s'est notamment prononcé en faveur du rejet de la requête d'effet suspensif, à l'instar de l'intimé.
D.
Par ordonnance présidentielle du 29 novembre 2018, l'effet suspensif a été attribué au recours.
E.
Par ordonnance présidentielle du 19 décembre 2018, la requête de reconsidération de l'ordonnance du 29 novembre 2018 formée le 5 décembre 2018 par l'intimé a été rejetée.
Considérant en droit :
1.
1.1. L'arrêt querellé, qui refuse de suspendre l'exécution d'une ordonnance de mesures provisionnelles rendue dans le cadre d'une procédure de divorce, contre laquelle un appel a été formé, constitue une décision incidente en matière civile (art. 72 al. 1 LTF; ATF 137 III 475 consid. 1).
La Cour d'appel n'a pas statué sur recours mais en qualité d'instance cantonale unique sur l'effet suspensif requis dans le cadre d'une procédure d'appel; le recours en matière civile est cependant admissible en vertu de l'art. 75 al. 2 LTF (ATF 138 III 41 consid. 1.1; 137 III 424 consid. 2.2).
Le recours contre une décision incidente est soumis à la même voie de droit que celle qui est ouverte contre la décision principale (ATF 137 III 380 consid. 1.1). La cause pour laquelle l'effet suspensif est requis porte notamment sur le retrait provisionnel du droit de la mère de déterminer le lieu de résidence des enfants et le placement de ces derniers; le litige a ainsi pour objet une affaire non pécuniaire, de sorte que le recours est recevable indépendamment de la valeur litigieuse (arrêts 5A_781/2015 du 14 mars 2016 consid. 1; 5A_331/2015 du 20 janvier 2016 consid. 1). Le présent recours a en outre été interjeté dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et en la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi par une partie qui a succombé dans ses conclusions en instance cantonale (art. 76 LTF).
1.2. Hormis les décisions mentionnées à l'art. 92 al. 1 LTF, une décision préjudicielle ou incidente ne peut être entreprise immédiatement que si elle peut causer un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 93 al. 1 let. b LTF; ATF 134 II 124 consid. 1.3).
Le " préjudice irréparable " au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF doit être de nature juridique et ne pas pouvoir être réparé ultérieurement par une décision finale favorable au recourant, en particulier parce que la décision incidente contestée ne peut plus être attaquée avec la décision finale, rendant ainsi impossible le contrôle par le Tribunal fédéral. Il appartient au recourant d'alléguer et d'établir la possibilité que la décision préjudicielle ou incidente lui cause un tel dommage (ATF 134 III 426 consid. 1.2), à moins que celui-ci ne fasse d'emblée aucun doute (ATF 141 III 80 consid. 1.2; 133 III 629 consid. 2.3.1).
Selon la jurisprudence, la décision entreprise est de nature à causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, car le retrait du droit de déterminer le lieu de résidence et le placement ont été prononcés pour la durée de la procédure, de sorte que même si le parent frustré de sa prérogative parentale obtient finalement gain de cause au fond, aucune réparation ne sera possible pour la période écoulée (ATF 120 Ia 260 consid. 2b; arrêt 5A_438/2015 du 25 juin 2015 consid. 1.2).
Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le recours.
2.
2.1. La décision accordant l'effet suspensif, comme celle d'exécution provisoire ou de retrait de l'effet suspensif (ATF 137 III 475 consid. 2), est une décision de mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF, de sorte que seule la violation de droits constitutionnels peut être invoquée. Le Tribunal fédéral n'examine en outre les griefs de violation de droits constitutionnels que s'ils ont été invoqués et motivés (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF), à savoir expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références; 139 I 229 consid. 2.2 et les références). Le recourant qui se plaint de la violation d'un droit fondamental ne peut donc se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en instance d'appel, où l'autorité de recours jouit d'une libre cognition; il ne...

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