Arret Nº 4A_320/2018 Tribunal fédéral, 13-12-2018

Judgement Number4A_320/2018
Date13 décembre 2018
Subject MatterDroit des contrats bail à loyer; réduction du loyer en raison de défauts
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_320/2018
Arrêt du 13 décembre 2018
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes les Juges fédérales
Kiss, présidente, Niquille et May Canellas.
Greffière: Mme Monti.
Participants à la procédure
1. L1.________,
2. L2.________ SA,
tous deux représentés par
Me Michael Rudermann,
recourants,
contre
B.________,
représenté par Me Antoine Böhler,
intimé.
Objet
bail à loyer; réduction du loyer en raison de défauts,
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 23 avril 2018 par la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève
(C/2965/2016; ACJC/495/2018).
Faits :
A.
A.a. Le bailleur B.________ est lié aux locataires L1.________ et L2.________ SA par un contrat de bail à loyer conférant à ceux-ci l'usage d'une arcade commerciale de 120 m 2et d'un espace de 60 m 2 situés respectivement au rez-de-chaussée et au sous-sol d'un immeuble en ville de Genève. Le loyer mensuel a été fixé en dernier lieu à 6'278 fr., plus 290 fr. de charges.
Initialement destinés à l'exploitation d'un vidéoclub, les locaux ont ensuite abrité un magasin de produits.... Entre les mois de février et juillet 2014, un commerçant franchisé a exploité les locaux sous l'enseigne «X.________».
A.b. Le 16 juin 2014, un dégât d'eau est survenu dans l'arcade en raison d'une fuite sur une traînasse.
Le 29 juillet 2014, un refoulement dans les toilettes a causé une inondation dans l'arcade, nécessitant l'intervention des pompiers.
A.c. Les locataires ont adressé à la régie mandatée par le bailleur un courrier non daté que l'intéressée dit avoir reçu le 3 novembre 2014, dans lequel ils déploraient que tous les travaux de remise en état de l'arcade n'aient pas été effectués; ils précisaient que l'état du sol bombé et dangereux tant pour le personnel que la clientèle les empêchait de rouvrir l'arcade comme ils souhaitaient le faire.
Dans sa réponse du 6 novembre 2014, la régie s'est étonnée de cette demande de travaux «au vu de l'état de l'arcade lors de [son] dernier passage». Elle a cependant proposé un rendez-vous sur place avec son technicien.
A.d. Le 5 mai 2015, à la suite d'un échange téléphonique puis d'un courrier électronique de la régie concernant un retard de loyer, la locataire L2.________ SA a invité la régie à effectuer un constat des dégâts occasionnés par les fuites d'eau; elle précisait que le sol était bombé et dangereux et que le plafond avait subi des dégâts. La locataire rappelait à cet égard qu'elle avait contacté la régie à la fin de l'année 2014 ou au début de l'année 2015 et que le rendez-vous fixé avait été annulé sans qu'elle ait été recontactée depuis lors.
Les parties ont ensuite échangé des courriers électroniques en vue de fixer un rendez-vous au mois de mai 2015. De nouveaux échanges ont eu lieu au mois d'août 2015 pour évoquer un éventuel changement d'affectation en vue de l'ouverture d'une pizzeria.
A.e. Le 2 octobre 2015, le locataire L1.________ a adressé un courrier électronique à la régie dans lequel il évoquait le démarrage de travaux en vue de la réouverture de l'arcade prévue le 2 novembre 2015 sous la même affectation; il souhaitait connaître la position de la régie au sujet des fuites d'eau survenues l'année précédente et sollicitait une remise en état urgente.
Le prénommé a relancé la régie les 6 octobre et 10 novembre 2015, en l'invitant par ce second courrier à s'exprimer sur les loyers versés et à échoir, compte tenu des travaux à réaliser.
La régie a répondu le 19 novembre 2015 qu'elle n'entendait pas entrer en matière sur une quelconque demande de réduction de loyer; elle arguait du fait que les locataires avaient eux-mêmes souhaité mettre en attente les travaux de remise en état des locaux, étant donné leur intention de trouver un repreneur; l'arcade commerciale n'était plus exploitée depuis plus d'une année.
Par missive du 3 décembre 2015, les locataires ont contesté avoir sollicité une mise en attente des travaux de réfection de l'arcade, précisant que l'état de celle-ci empêchait toute exploitation. Ils ont mis le bailleur en demeure d'entreprendre les travaux de remise en état dans un délai de trente jours, à défaut de quoi ils consigneraient le loyer. Les locataires ont en outre indiqué qu'ils entendaient réclamer une réduction, voire même une suppression du loyer depuis juillet 2014, compte tenu de l'ampleur des dégâts et de l'impossibilité évidente d'exploiter les locaux ou de trouver un repreneur dans ces conditions.
Le 23 décembre 2015, les locataires ont transmis à la régie un rapport d'expertise privée relatif à l'état des locaux, en sommant le bailleur de remédier aux défauts d'étanchéité des fenêtres mis en exergue dans ledit rapport, et ce dans le délai fixé par le précédent courrier du 3 décembre 2015.
Le 11 janvier 2016, la régie a émis des bons de travail pour la réfection des sols et du plafond.
Plusieurs courriers ont encore été échangés.
B.
B.a. Le 12 février 2016, les locataires ont saisi la Commission de conciliation en matière de baux et loyers d'une requête concluant à la suppression du loyer depuis le 1er juillet 2014 jusqu'à complète exécution des travaux de remise en état, ainsi qu'au remboursement des loyers versés en trop.
B.b. Entre le début du mois de mars et le 8 avril 2016, le bailleur a fait procéder à certains travaux. Une reprise des joints d'étanchéité a été exécutée sur deux vitrines. En outre, les plafond et plancher du rez-de-chaussée supérieur ont été remis en état.
B.c. Le 2 juin 2016, les locataires ont saisi le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève d'une demande concluant à ce que le bailleur soit condamné à effectuer divers travaux de remise en état (plafond et plancher au rez-de-chaussée inférieur; étanchéité des vitrines; peintures des murs comportant des traces d'humidité). Les demandeurs prétendaient en outre à la suppression du loyer pour la période du 16 juin 2014 au 8 avril 2016, puis à une réduction de 50% dès le 9 avril 2016 jusqu'à complète exécution des travaux, au remboursement des loyers perçus en trop, et enfin au remboursement des frais d'expertise privée (1'296 fr. et 864 fr.).
B.d. Entendu par le Tribunal, le locataire L1.________ a notamment expliqué que le commerçant franchisé qui exploitait un magasin «X.________» avait quitté les locaux de manière anticipée vers la fin du mois de juin ou le début du mois de juillet 2014; il y avait un problème de paiement du loyer. Ils avaient demandé la remise en état de l'arcade à la fin octobre 2014, car ils voulaient rouvrir un commerce sous le concept «Y.________»; pour passer à ce concept, ils avaient procédé en novembre 2014 à de petits travaux, soit l'aménagement d'étagères. Vers la fin du 1er trimestre 2015, ils avaient eu des contacts avec des repreneurs intéressés. Après les travaux de mars 2016, l'arcade avait rouvert le 14 avril 2016 sous le concept Z.________, puis avait fermé le 15 août 2016. Au jour de l'audience du 3 mars 2017, l'arcade abritait un commerce de boissons avec des produits d'épicerie.
-., technicien chargé par la régie de s'occuper de l'immeuble du bailleur, a déclaré qu'à l'issue du rendez-vous de novembre 2014, la décision avait été prise de ne pas faire les travaux, vu le changement d'affectation évoqué. Il ignorait si cette décision avait été prise de concert avec P._ _______, collaboratrice de la locataire L2.________ SA. Ne sachant pas quelle orientation les locataires souhaitaient donner aux locaux, il n'avait pas immédiatement commandé les travaux, car il était préférable de connaître l'affectation des locaux pour adapter les travaux.
B.e. Statuant le 15 mai 2017, le Tribunal des baux et loyers a jugé en substance que les locaux étaient affectés de défauts non imputables aux locataires. Le bailleur n'en avait éliminé qu'une partie (cf. lettre B.b supra). Aussi le Tribunal lui a-t-il ordonné d'éliminer les défauts subsistants (plancher du rez-de-chaussée inférieur; étanchéité des joints des vitrines non encore réparées; peintures de certains murs présentant des traces d'humidité). Concernant la réduction de loyer, le Tribunal a distingué deux périodes: une réduction initiale de 20% se justifiait du 29 juillet 2014 au 8 avril 2016 (date à laquelle une partie des travaux avaient été accomplis). A compter du 9 avril 2016, une réduction de 10% devait prévaloir jusqu'à l'exécution complète des travaux mentionnés ci-dessus. Le Tribunal a condamné le bailleur à restituer les loyers versés en trop et à rembourser partiellement les frais d'expertise privée (1'296 fr. plus intérêts).
B.f. Les locataires ont fait appel de ce jugement, suscitant un appel joint du bailleur.
Les travaux ordonnés par le Tribunal des baux et loyers ont été exécutés dans l'intervalle.
Par arrêt du 23 avril 2018, la Cour de justice genevoise a constaté que les conclusions en exécution des travaux étaient désormais privées d'objet. Concernant la réduction de loyer, la Cour de justice a confirmé qu'un taux initial de 20% devait être retenu, mais a considéré que cette réduction ne s'appliquait qu'à compter du 2 octobre 2015, les locataires ayant renoncé à l'exécution des travaux de remise en état, et partant à une réduction de...

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