Arret Nº 4A_260/2017 Tribunal fédéral, 20-02-2018

Date20 février 2018
Judgement Number4A_260/2017
Subject MatterJuridiction arbitrale* arbitrage international en matière de sport
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_260/2017
Arrêt du 20 février 2018
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes les Juges Kiss, présidente, Klett, Hohl, Niquille et May Canellas.
Greffier: M. Carruzzo.
Participants à la procédure
X.________, représenté par Mes Jean-Louis Dupont et Martin Hissel, c/o Me Alexandre Zen-Ruffinen,
recourant,
contre
Fédération Internationale de Football Association,
représentée par Me Antonio Rigozzi,
intimée.
Objet
arbitrage international en matière de sport,
recours en matière civile contre la sentence rendue le 9 mars 2017 par le Tribunal Arbitral du Sport
(TAS 2016/A/4490).
Faits:
A.
A.a. La Fédération Internationale de Football Association (FIFA), association de droit suisse ayant son siège à Zurich, est l'instance dirigeante du football au niveau mondial. Elle a édicté, entre autres prescriptions, un Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs (RSTJ), dont la version actuelle, approuvée par le Conseil de la FIFA le 27 octobre 2017, est entrée en vigueur le 1er janvier 2018. L'un des buts de cette réglementation consiste à limiter l'influence que peuvent exercer des acteurs extérieurs au monde du football sur ce dernier et à éviter que des tiers n'acquièrent la propriété des droits économiques des joueurs (chap. V du RSTJ: "Influence de tiers et propriété des droits économiques des joueurs par des tiers").
Normalement, la titularité des droits fédératifs découlant de l'enregistrement obligatoire du joueur auprès d'une association nationale (possibilité de faire participer le joueur aux compétitions organisées par cette association, pouvoir de lui infliger des sanctions, etc.) et celle des droits économiques concernant ledit joueur (indemnité de transfert, par ex.) sont indissociables. Cependant, depuis plusieurs années déjà, s'est instaurée, dans certains pays d'Amérique du Sud et d'Europe (l'Espagne et le Portugal, en particulier), une pratique caractérisée par la dissociation de ces deux catégories de droits. Appelée tierce propriété des droits économiques sur les joueurs de football et plus connue sous sa dénomination anglaise - Third Party Ownership (TPO) -, cette pratique consiste pour un club de football professionnel à céder, totalement ou partiellement, à un tiers investisseur ses droits économiques sur un joueur, de manière à ce que cet investisseur puisse bénéficier de l'éventuelle plus-value que le club réalisera lors du transfert futur du joueur. En contrepartie, l'investisseur fournit une aide financière à ce club pour lui permettre de résoudre des problèmes de trésorerie ou l'aider à acquérir un joueur, entre autres objectifs. Dans cette dernière hypothèse, le club intéressé par un joueur, mais n'ayant pas les moyens de payer l'indemnité de transfert exigée par l'employeur actuel de ce joueur, fait appel à un investisseur qui lui fournit les fonds nécessaires au paiement de tout ou partie de l'indemnité de transfert en échange d'un intéressement sur l'indemnité que le club obtiendra en cas de transfert ultérieur du joueur. Controversées à différents titres, les opérations de ce genre ont été interdites en France dès 1988, en Angleterre à partir de 2008 et, plus récemment, en Pologne.
Consciente du problème, la FIFA a adopté, en 2008, l'art. 18bis RSTJ ainsi libellé:
"1.
Aucun club ne peut signer de contrat permettant au (x) club (s) adverse (s), et vice versa, ou à des tiers d'acquérir dans le cadre de travail ou de transferts la capacité d'influer sur l'indépendance ou la politique du club ou encore sur les performances de ses équipes.
2.
La Commission de Discipline de la FIFA peut imposer des sanctions aux clubs ne respectant pas les obligations prévues par le présent article. "
En 2012, la FIFA a procédé à diverses études, consultations et discussions avec les principaux acteurs du football relativement aux TPO. Les résultats de cette enquête à grande échelle ont conduit son Comité exécutif à introduire un nouvel art. 18ter dans le RSTJ lors d'une séance tenue les 18 et 19 décembre 2014. Le texte de cette disposition a été adressé aux associations membres de la FIFA via une circulaire n° 1464 du 22 décembre 2014. Il énonce ce qui suit:
"1.
Aucun club ou joueur ne peut signer d'accord avec un tiers permettant à celui-ci de pouvoir prétendre, en partie ou en intégralité, à une indemnité payable en relation avec le futur transfert d'un joueur d'un club vers un autre club, ou de se voir attribuer tout droit en relation avec un transfert ou une indemnité de transfert futur (e).
2.
L'interdiction énoncée à l'alinéa 1 entre en vigueur le 1er mai 2015.
3.
Les accords couverts par l'alinéa 1 antérieurs au 1er mai 2015 peuvent rester valables jusqu'à leur expiration contractuelle. Cependant, leur durée ne peut pas être prolongée.
4.
La durée de tout accord couvert par l'alinéa 1 signé entre le 1er janvier 2015 et le 30 avril 2015 ne peut excéder un an à partir de la date effective.
5.
D'ici à la fin du mois d'avril 2015, tous les accords existants couverts par l'alinéa 1 doivent être entrés dans TMS. Tous les clubs ayant signé des accords de ce type doivent les soumettre - dans leur intégralité et en incluant tout amendement ou annexe - dans TMS, en spécifiant les informations relatives au tiers concerné, le nom complet du joueur ainsi que la durée de l'accord.
6.
La Commission de Discipline de la FIFA peut imposer des sanctions disciplinaires aux clubs ou joueurs ne respectant pas les obligations contenues dans la présente annexe."
Au sens du RSTJ, le "tiers" est une partie autre que les deux clubs transférant un joueur de l'un vers l'autre, ou tout club avec lequel le joueur a été enregistré. Quant au "TMS" ( Transfer Matching System), ou système de régulation des transferts, il s'agit d'un système d'information en ligne ayant pour principal objectif de simplifier les procédures de transferts internationaux de joueurs ainsi que d'améliorer la transparence et la circulation des informations.
A.b. Le 30 janvier 2015, X.________ (ci-après: X.________ ou le club), un club de football affilié à l'Union royale belge des sociétés de football association (URBSFA), qui évolue au troisième niveau national du football belge, d'une part, et W.________ Limited (ci-après: W.________), une société d'investissement de droit... s'autoproclamant "the world leader in «Third Party Ownership»", d'autre part, ont conclu un contrat de type TPO, intitulé " Cooperation Agreement ", en vertu duquel le club transférait à W.________ 30% des droits économiques afférents à trois joueurs nommément désignés contre paiement par W.________ de 300'000 euros en trois tranches, la dernière arrivant à échéance au mois de février 2016. Ledit contrat devait déployer ses effets jusqu'au 1er juillet 2018 et son éventuelle prolongation était réservée.
En date du 7 juillet 2015, les mêmes parties ont signé un second accord du même type par lequel X.________ a vendu à W.________ 25% des droits économiques d'un joueur portugais en contrepartie d'une somme de 50'000 euros. Le club a également conclu un contrat de travail avec ce joueur, qui était un agent libre.
Ces différents accords ont été transmis à la filiale de la FIFA qui gère le TMS.
A.c. Le 2 juillet 2015, le secrétariat de la Commission de discipline de la FIFA, via l'URBSFA, a ouvert une procédure disciplinaire à l'encontre de X.________ pour violation des art. 18bis et 18ter RSTJ relativement à l'accord de coopération. Il a étendu le champ d'application de cette procédure, le 21 juillet 2015, après avoir appris l'existence du second accord.
La Commission de discipline de la FIFA a rendu une décision, le 4 septembre 2015. Reconnaissant le club coupable d'avoir violé les art. 18bis et 18ter RSTJ, elle lui a interdit d'enregistrer des joueurs, tant au niveau national qu'international, pendant les quatre périodes d'enregistrement suivant la notification de sa décision et l'a condamné au paiement d'une amende de 150'000 fr.
Statuant le 7 janvier 2016, la Commission de recours de la FIFA a rejeté le recours formé par le club et confirmé la décision de première instance.
B.
B.a. Le 9 mars 2016, X.________ a interjeté appel auprès du Tribunal Arbitral du Sport (TAS).
La procédure d'arbitrage a été conduite en français par une Formation de trois arbitres (ci-après: la Formation), présidée par M. A.________, Conseiller d'État français, qui a tenu une audience d'instruction et de jugement le 17 octobre 2016 au siège du TAS, à Lausanne, en présence de l'appelant et de ses conseils, ainsi que des représentants de la FIFA. Le 12 avril 2016, le TAS a informé les parties de la suspension de la décision attaquée jusqu'à la notification de sa sentence.
Le club appelant a formulé à plusieurs reprises des demandes de suspension de la procédure d'arbitrage jusqu'à droit jugé dans d'autres procédures pendantes devant la Commission européenne et devant les juridictions belges quant à la légalité du TPO ainsi que dans l'attente de la communication de l'arrêt rendu le 13 décembre 2016 par la Ire Cour de droit civil du Tribunal fédéral suisse dans la cause 4A_116/2016 opposant Sporting Clube de Portugal - Futebol, SAD, à W.________. La Formation a rejeté toutes ces demandes, à l'admission desquelles la FIFA s'était opposée, les premières parce qu'il y avait incertitude au sujet des délais dans lesquels des décisions définitives pourraient être rendues dans les procédures y relatives, la seconde du fait que l'objet de la procédure soumise au Tribunal fédéral suisse ne présentait pas de connexité avec l'arbitrage en cours.
Le 9 mars 2017, la Formation a rendu sa sentence finale. Admettant partiellement l'appel, elle a réformé la décision attaquée en ce sens que l'interdiction faite à X.________ d'enregistrer des joueurs, tant au niveau national qu'international, a été ramenée à...

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