Arret Nº 4A 598/2018 Tribunal fédéral, 12-04-2019

Judgement Number4A 598/2018
Date12 avril 2019
Subject MatterDroit des contrats contrat de bail
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_598/2018
Arrêt du 12 avril 2019
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux
Kiss, présidente, Klett et Abrecht, juge suppléant.
Greffier: M. O. Carruzzo.
Participants à la procédure
A.________,
demandeur et recourant,
contre
B.________ SA,
représentée par Me Jean-François Marti,
défenderesse et intimée.
Objet
contrat de bail,
recours contre l'arrêt rendu le 8 octobre 2018 par la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève (C/21648/2016, ACJC/1357/2018).
Faits :
A.
A.a. B.________ SA est propriétaire de l'immeuble sis... à Genève, dans le quartier des Eaux-Vives.
Le 8 janvier 2016, la régie en charge de la gestion de l'immeuble a confirmé à A.________ qu'elle pourrait lui attribuer un appartement de quatre pièces et demie au deuxième étage de l'immeuble susmentionné courant 2016. Le bail serait conclu pour une durée de 4 ans à terme fixe. En application de la loi genevoise sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (LDTR; RS/GE L 5 20), le loyer mensuel devait être fixé durant trois ans à 1'297 fr., les provisions pour chauffage et eau chaude à 120 fr. par mois et les acomptes mensuels pour frais d'exploitation à 180 fr. Le loyer mensuel augmenterait ensuite à 2'400 fr. pour la quatrième année.
Il résulte du préavis émis le 14 avril 2016 par le service LDTR relatif à la demande d'autorisation de construire en vue de la rénovation de l'appartement litigieux que le loyer annuel devait être fixé à 17'724 fr. pendant trois ans à compter de la remise en location qui suivrait la fin des travaux.
A.________ a transmis à la régie sa fiche d'inscription pour l'appartement le 7 octobre 2016.
A.b. Le contrat de bail a été signé le 11 octobre 2016.
A teneur de l'article 7 dudit contrat, la location débutait le 16 octobre 2016 et le bail venait à échéance le 31 octobre 2020. L'article précise que "le bail est de durée limitée et s'éteint sans résiliation préalable le 31.10.2020".
Le bail contenait une clause d'échelonnement prévoyant que le loyer annuel se monterait à 17'724 fr. hors charges du 16 octobre 2016 au 31 octobre 2019 et à 34'800 fr. hors charges du 1er novembre 2019 au 31 octobre 2020. L'avis de fixation du loyer initial mentionne que le loyer est soumis à la LDTR jusqu'au 31 octobre 2019 et que dès le 1er novembre 2019, il est conforme aux loyers usuels de la localité ou du quartier.
L'acompte de frais de chauffage et eau chaude a été fixé à 1'440 fr. par année et l'acompte annuel pour frais d'exploitation à 2'160 fr.
B.
B.a. Par deux requêtes séparées - jointes par ordonnance du 1 er mars 2017 - déposées en vue de conciliation le 4 novembre 2016 et portées devant le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève (ci-après: le Tribunal) le 15 février 2017, A.________ a conclu à ce que le loyer annuel soit fixé à 17'724 fr., provisions pour chauffage et eau chaude exclusivement non comprises, à partir du 1 er novembre 2016, et à ce que soit constatée l'existence d'un contrat de durée indéterminée, se renouvelant tacitement d'année en année à partir du 1 er novembre 2020.
Dans sa réponse du 8 mai 2017, la bailleresse a conclu principalement à ce que le Tribunal déclare irrecevable, respectivement rejette, la requête en constatation de l'existence d'un contrat de durée indéterminée, rejette la requête en contestation de loyer initial et dise que la perception de frais d'exploitation avait été valablement convenue.
Devant le Tribunal, le demandeur a exposé que la fraude à la loi qu'il reprochait à la défenderesse consistait à mettre en place, lorsque le loyer initial était fixé consécutivement à la rénovation d'un logement et donc soumis au contrôle des loyers prévu par la LDTR, un système permettant de prévenir le risque de contestation du loyer initial, en concluant avec le locataire un contrat de durée déterminée prévoyant un loyer échelonné (trois ans de loyer fixé par le département, puis un à deux ans avec un loyer largement majoré) [cf. consid. 3.2.3 infra].
B.b. Le Tribunal a tenu des audiences en date des 2 juin et 23 juin 2017, lors desquelles il a entendu les parties et un témoin.
Entendu en qualité de partie à l'audience de débats principaux du 2 juin 2017, A.________ a déclaré que pour lui, l'expression "à terme fixe" contenue dans le courrier de la régie du 8 janvier 2016 signifiait que les conditions étaient fixées pour les quatre premières années. A réception de cette lettre, il avait questionné la représentante de la gérance de l'immeuble, U.________, qui lui avait répondu de ne pas s'inquiéter et que le bail serait renouvelé. Il avait parcouru le bail en diagonale lors de sa signature et n'avait pas lu l'article 7 indiquant que le contrat s'éteignait sans résiliation préalable le 31 octobre 2020. A cette époque, il était dans la contrainte car il avait attendu un an pour cet appartement. Avant, il vivait chez sa mère. Il avait également la pression de pouvoir recevoir ses enfants car il était en pleine séparation [cf. consid. 3.2.2 infra]. Ce n'était que lors de l'état des lieux d'entrée qu'une autre personne de la régie l'avait informé qu'il devrait partir après quatre ans. Il avait alors répondu que cela ne correspondait pas à ce que U.________ lui avait dit. La veille de la signature du bail, il avait été informé que le dernier échelon pour la quatrième année serait plus élevé que celui annoncé en janvier 2016.
Lors de l'audience du 2 juin 2017, l'avocat Jean-François Marti, représentant la défenderesse qui n'avait pas comparu personnellement, a déclaré ce qui suit: « Il n'y a pas de motif particulier pour avoir conclu un bail de durée déterminée, c'est la loi qui le permet sans avoir à motiver ce choix. En l'espèce, il n'y a pas de motif. » (cf. consid. 3.2.1 infra).
Entendue comme témoin à l'audience de débats principaux du 23 juin 2017, U.________ a déclaré avoir été employée par la régie en charge de la gestion de l'immeuble de 2011 à 2016. A l'époque, son groupe avait comme politique de conclure, pour les nombreux appartements soumis à la LDTR qu'il gérait, des baux de durée déterminée de trois ans au loyer LDTR et deux aux loyers du marché, soit des baux de cinq ans. Des baux de durée déterminée étaient prévus pour tous les objets visités par A.________. Elle avait souvent vu des renouvellements de baux de durée déterminée. Elle avait peut-être parlé à A.________ de cette pratique qu'elle avait observée au sein de la régie mais ne lui avait donné aucune assurance quant au fait que son bail serait renouvelé " ad vitam aeternam ". Elle lui avait indiqué qu'il était possible qu'il puisse rester dans l'appartement à l'échéance du bail mais ce n'était qu'un projet au stade embryonnaire. A.________ avait toujours été au courant de la durée limitée à quatre ans de son bail. Elle ne lui avait jamais dit de ne pas se préoccuper de la mention "à terme fixe" et avait été claire quant au fait que la suite, après l'échéance de la durée déterminée, n'avait rien de certain. A.________ avait besoin d'avoir un projet par rapport à la garde de ses enfants, ce qui les avait un peu brusqués car l'appartement venait d'être libéré (cf. consid. 3.2.2 infra).
B.c. Par jugement du 18 décembre 2017, le Tribunal a fixé le loyer annuel litigieux à 17'724 fr., provisions pour chauffage et eau chaude exclusivement non comprises, du 1 er novembre 2016 au 31 octobre 2019, puis à 20'571 fr. dès le 1er novembre 2019, acomptes pour chauffage et eau chaude et frais accessoires non compris. Il a constaté que le contrat de bail du 11 octobre 2016 conclu entre B.________ SA et A.________ était de durée indéterminée et a débouté les parties de toutes autres conclusions.
En bref, le Tribunal a considéré, s'agissant de la seule question demeurant litigieuse devant le Tribunal fédéral (cf. consid. 2.2 infra), que la pratique de la régie consistant à conclure des baux de durée déterminée de quatre ou cinq ans prévoyant un loyer correspondant au loyer maximal autorisé en application de la LDTR durant les trois premières années puis un loyer majoré pour la/les année (s) suivante (s) visait à augmenter le loyer de manière significative tout en limitant la possibilité pour le locataire de contester l'échelon, de peur que son contrat ne soit pas prolongé. Une telle pratique étant frauduleuse, il convenait de constater que le contrat était de durée indéterminée.
B.d. Statuant par arrêt du 8 octobre 2018 sur appel de la défenderesse et appel joint du demandeur, la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève a notamment annulé le jugement du 18 décembre 2017 en tant qu'il constatait que le contrat de bail du 11 octobre 2016 était de durée indéterminée.
En bref, les juges cantonaux ont estimé que la défenderesse n'avait pas commis de fraude à la loi en concluant le contrat litigieux. Ils ont par ailleurs considéré que l'interprétation des déclarations de volonté des parties conduisait à retenir que celles-ci avaient conclu un bail de durée déterminée, contrairement à ce que soutenait le demandeur dans un grief subsidiaire.
C.
Par acte du 9 novembre 2018, le demandeur a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 8 octobre 2018, en concluant, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens qu'il soit constaté que le contrat de bail du 11 octobre 2016 est un contrat de durée indéterminée, et subsidiairement au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision sur ce point.
Par réponse du 9 janvier 2019, la défenderesse a conclu, avec suite de frais et dépens, principalement à l'irrecevabilité du recours et subsidiairement à son rejet et à la confirmation de l'arrêt entrepris.
L'autorité précédente a déclaré se référer...

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