Arret Nº 4A 377/2018 Tribunal fédéral, 05-07-2019

Judgement Number4A 377/2018
Date05 juillet 2019
Subject MatterDroit des sociétés liquidation de la société simple (concubinage)
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_377/2018
Arrêt du 5 juillet 2019
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes les Juges fédérales
Kiss, présidente, Hohl et May Canellas.
Greffière: Mme Monti.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Sébastien Pedroli et Me Elodie Fuentes,
recourante,
contre
X.________,
représentée par Me Henriette Dénéréaz Luisier,
intimée.
Objet
liquidation de la société simple,
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 15 mai 2018 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (n° 288; PT13.022386-171567).
Faits :
A.
X.________ a vécu en concubinage avec feu Y.________ de 1990 jusqu'au décès de celui-ci, survenu le 4 octobre 2010. Durant toute leur vie commune, ils ont uni leurs efforts et leurs ressources.
Après avoir vécu dix ans dans un logement loué, les prénommés se sont mis en quête d'une maison afin d'y poursuivre leur vie à deux. Le 21 décembre 2000, Y.________ a été inscrit au registre foncier comme unique propriétaire d'une villa sise à... (VD), acquise dans le cadre d'une réalisation forcée le 22 novembre 2000. Les concubins, qui avaient la volonté d'acheter conjointement ce bien immobilier, s'étaient rendus tous deux à la vente aux enchères, en compagnie de Z.________. Ce proche de Y.________ avait procédé à une avance financière en leurs noms, en échange d'une reconnaissance de dette signée par les deux intéressés. Toutefois, à la suite d'un malentendu, seul Y.________ avait signé les documents auprès du commissaire-priseur.
Le prix d'achat de la villa, soit 320'000 fr., a été payé grâce à des fonds propres de Y.________ (55'000 fr.), ainsi qu'à un emprunt hypothécaire de 265'000 fr. contracté solidairement par les concubins auprès d'une banque le 7 décembre 2000.
Par la suite, un garage a été bâti sur cette propriété. La construction a été financée par un emprunt de 20'000 fr. contracté le 20 juillet 2003 par Y.________ auprès de la soeur de sa concubine ainsi que par une augmentation de l'hypothèque de 15'000 fr. en date du 17 novembre 2003.
Les intérêts hypothécaires étaient réglés par l'intermédiaire du compte bancaire de Y.________, lequel était alimenté par les deux concubins. Quant à l'emprunt de 20'000 fr. contracté auprès de la soeur de X.________, c'est cette dernière qui en a remboursé les trois quarts (15'000 fr.), le solde ayant été compensé par des prestations de services de Y.________.
Le 5 septembre 2010, Y.________ a légué tous ses biens mobiliers à sa concubine. A son décès le 4 octobre 2010, sa fille A.________ a hérité de la villa de... (VD).
L'immeuble a été vendu 750'000 fr. le 20 décembre 2011. Le décompte de cette vente, daté du 5 avril 2012, fait état d'un solde net de 405'920 fr. 55, après déduction de la dette hypothécaire, de la commission de courtage et de l'impôt sur le gain immobilier. Le notaire a consigné la moitié de cette somme, soit 202'960 fr. 30.
B.
B.a. Par requête de conciliation du 10 décembre 2012, X.________ a assigné A.________ devant la Chambre patrimoniale du canton de Vaud. Elle a ensuite déposé une demande le 22 mai 2013, concluant principalement au paiement de 227'858 fr. 80, subsidiairement 199'208 fr. 08, plus intérêts. Elle a également conclu à ce que le montant consigné en mains du notaire soit libéré en sa faveur avec effet immédiat, à concurrence des montants précités.
Une expertise a été mise en oeuvre en cours de procédure. Dans son rapport du 5 août 2015 et son complément du 29 mars 2016, le notaire mandaté en qualité d'expert a exposé qu'entre 2000 et 2010, la demanderesse avait perçu des revenus notablement supérieurs à ceux de son concubin, lesquels étaient pour certaines années assez faibles, voire négatifs. Se basant sur leurs revenus respectifs, l'expert a jugé « très vraisemblable que X.________ ait remis régulièrement à Y.________ des montants au titre de participation aux charges de l'immeuble - et donc notamment aux intérêts hypothécaires - ou ait payé directement lesdites charges », sans toutefois pouvoir en déterminer le montant exact, ni même l'estimer.
Par jugement du 23 février 2017, la Chambre patrimoniale a condamné la fille du défunt à verser à la concubine la somme de 184'372 fr. 75 plus intérêts et a ordonné au notaire de libérer avec effet immédiat en faveur de cette dernière le montant éventuellement encore consigné, à concurrence de la somme précitée. En substance, la Chambre a retenu que les concubins avaient mis en commun leurs efforts et leurs ressources dans le but de vivre ensemble et d'acquérir la villa sise à... (VD). En application des principes régissant la société simple tacite, les concubins devaient être considérés économiquement comme les propriétaires communs de la villa; dans le cadre de la liquidation de la société simple qu'elle avait formée avec le défunt, la concubine avait droit à une somme comprenant ses apports (15'000 fr.) ainsi que la moitié du bénéfice de liquidation (166'100 fr. 25). Venait s'y greffer le remboursement de factures acquittées pour le compte du défunt (3'272 fr. 50).
B.b. Par arrêt du 15 mai 2018, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal vaudois a rejeté l'appel formé par la fille du défunt. En substance, cette autorité a jugé que les concubins avaient formé une société simple également pour l'acquisition de l'immeuble; il importait peu de savoir s'il s'agissait-là d'un apport en propriété ou en destination puisque dans les deux cas, la concubine devait participer à la plus-value conjoncturelle enregistrée par l'immeuble entre son acquisition et sa réalisation.
C.
La fille du défunt (ci-après: la recourante) a saisi le Tribunal fédéral d'un recours en matière civile concluant au rejet de la demande.
L'autorité précédente ainsi que la concubine (ci-après: l'intimée) n'ont pas été invitées à se déterminer.
Par ordonnance présidentielle du 5 septembre 2018, la requête d'effet suspensif formée par la recourante a été rejetée, faute d'être motivée.
Considérant en droit :
1.
L'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière civile (art. 72 LTF) par un tribunal supérieur statuant sur recours (art. 75 LTF). La cause atteint la valeur litigieuse minimale de 30'000 fr. ouvrant la voie du recours en matière civile (art. 74 al. 1 let. b LTF). Exercé au surplus dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme requise (art. 42 LTF), par la partie qui a succombé dans ses conclusions et a de ce fait qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF), le présent recours est recevable sur le principe.
2.
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a...

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