Arret Nº 2C 711/2018 Tribunal fédéral, 07-06-2019

Date07 juin 2019
Judgement Number2C 711/2018
Subject MatterDroits réels Acquisition d'une entreprise agricole
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
2C_711/2018
Arrêt du 7 juin 2019
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Seiler, Président,
Zünd, Aubry Girardin, Donzallaz et Haag.
Greffière : Mme Jolidon.
Participants à la procédure
X.________,
représenté par Me Alain Dubuis, avocat,
recourant,
contre
Commission foncière rurale du canton de Vaud,
Section I,
intimée,
1. Département de l'économie, de l'innovation et du sport du canton de Vaud (DEIS) Secrétariat général,
2. A.________ SA,
représentée par Me Gaspard Couchepin, avocat,
3. B.________,
4. C.Y.________,
5. D.Y.________,
6. E.Y.________,
tous les quatre représentés par Me Jean-Michel Henny, avocat,.
Objet
Acquisition d'une entreprise agricole,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 27 juin 2018 (FO.2017.0011).
Faits :
A.
A.a. B.________, ainsi que C.Y.________, D.Y.________ et E.Y.________ sont propriétaires des parcelles nos ** et *** de la Commune de F.________ sises en zone viticole. Celles-ci forment un domaine d'environ 15 hectares qui comprend également des bâtiments sur une surface de 1'959 m2, dont le Château A.________.
Le 8 novembre 2016, les propriétaires ont conclu avec la société A.________ SA une vente à terme conditionnelle portant sur ce domaine; le prix de vente y a été fixé à 15'500'000 fr. Cet acte a été conclu sous la condition suspensive de l'obtention par l'acquéreur de l'autorisation définitive et exécutoire d'acquérir l'entreprise agricole en cause de la Commission foncière rurale Section I du canton de Vaud (ci-après: la Commission foncière). A.________ SA, inscrite au registre du commerce le 3 octobre 2016, a pour but, directement ou indirectement, l'achat et l'exploitation civiles ou commerciales de propriétés bâties et non-bâties, notamment vinicoles et viticoles, en Suisse et à l'étranger, ainsi que, notamment, l'exploitation des terres du Château A.________, en vue d'une production viti-vinicole, la création et le développement d'une activité de restauration, hôtellerie, gîte, ainsi que la commercialisation de tous vins et objets de toute nature, par exemple en lien avec les activités du domaine; la société a élaboré un projet de développement important du domaine en question.
Dans la Feuille des avis officiels du canton de Vaud du 18 novembre 2016, a été publié un appel d'offres public, selon lequel les parcelles nos ** et *** de la commune de F.________ avaient trouvé un acquéreur qui n'était pas un exploitant à titre personnel pour un montant total de 15'500'000 fr. Par lettre du 28 novembre 2016, X.________ a fait part de son intérêt, dans les termes suivants:
-.. Par les présentes, je vous informe être intéressé à l'achat des parcelles ** et *** de F.________, soit l'entreprise agricole "Château A.________ ". Je suis exploitant agricole à F.________, mon numéro d'exploitant étant le ********.
En application de l'art. 64 al. 1 lettre f LDFR, j'envisage de me porter acquéreur des deux parcelles mises en vente pour le prix licite, mais au maximum pour le prix global de fr. 15'500'000.-.
Afin que je puisse me déterminer en toute connaissance de cause, je vous serais reconnaissant de bien vouloir me communiquer la détermination du prix licite dans les meilleurs délais, soit la décision la fixant délivrée par l'autorité compétente.
Vous comprendrez qu'en fonction du prix, je me vois contraint, éventuellement, de réserver l'obtention du crédit hypothécaire nécessaire et me tiens à votre disposition pour vous fournir tous les documents nécessaires à une éventuelle procédure devant la Commission foncière à Lausanne, qui doit autoriser la vente et l'achat."
A la suite d'une requête du notaire en charge du dossier, X.________ a confirmé son intérêt par courrier du 27 décembre 2016:
"Par les présentes, je vous confirme mon intérêt et maintiens mon offre pour l'achat des parcelles ** et *** de F.________ au prix licite.
Dans le but d'obtenir l'éventuel financement nécessaire, je vous remercie de me communiquer le rapport de détermination du dit prix licite par retour de courrier, obtention de l'éventuel financement que je suis contraint de réserver ici.
Je précise qu'en l'état, je ne connais toujours pas le prix d'achat définitif.
La Commission foncière rurale me lit en copie, à qui je transmets également pour information votre correspondance du 15 décembre 2016 [...]."
Le 11 janvier 2017, X.________ a contacté la Commission foncière et lui a demandé de déterminer le prix licite, afin de pouvoir "finaliser le montage financier"; il précisait que les banques requerraient un rapport d'expert agréé.
Ladite commission a alors mandaté G.________ Sàrl. Dans un rapport du 9 mars 2017, cette société a fixé le prix licite des deux parcelles en cause à 20'151'000 fr. sans prendre les valeurs déterminées dans le cadre de l'assurance contre l'incendie et les éléments naturels (valeur ECA) respectivement à 20'443'000 fr. avec lesdites valeurs. A la demande de la Commission foncière, cette société a fourni un rapport complémentaire qui comporte des indications chiffrées sur des transactions comparables ayant eu lieu dans la région. Ayant reçu ces documents, X.________ a requis, en date du 24 mars 2017, la détermination de la valeur de rendement des deux parcelles en cause. Le 10 avril 2017, la Commission foncière l'a interpellé, en lui demandant de justifier son intérêt légitime à demander la fixation de la valeur de rendement, de lui adresser les compléments d'information relatifs à sa capacité financière à acquérir les parcelles en cause et de se déterminer sur les rapports d'expertise. Le 3 mai 2017, X.________ a contesté le prix licite tel que retenu par G.________ Sàrl et a sollicité la détermination de la valeur de rendement des parcelles concernées. Il réservait la problématique du financement à la détermination de cette valeur. Le 16 mai 2017, le notaire en charge de la vente s'est adressé à la Commission foncière en rappelant notamment qu'aux termes de sa réponse du 28 novembre 2016 à l'appel d'offres paru le 18 novembre 2016, X.________ envisageait de se porter acquéreur des parcelles en cause et réservait formellement un crédit hypothécaire; n'ayant pas été en mesure de confirmer son financement, on ne pouvait considérer ses déclarations comme une offre.
A.b.
Dans une décision du 19 mai 2017, la Commission foncière a refusé la requête de X.________ tendant à la fixation de la valeur de rendement du domaine; elle a constaté que celui-ci, même s'il avait manifesté son intérêt, n'avait pas présenté une offre ferme et susceptible d'être prise en considération. Elle a, en outre, arrêté le prix licite du domaine du Château A.________ à 19'028'000 fr. Par ailleurs, après avoir retenu que le prix prévu pour la vente à A.________ SA était inférieur au prix licite, elle a délivré à cette société l'autorisation d'acquérir ledit domaine.
B.
Par arrêt du 27 juin 2018, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal) a déclaré que le recours de X.________ à l'encontre de la décision du 19 mai 2017 susmentionnée était irrecevable. Elle a jugé que l'art. 64 al. 1 let. f de la loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le droit foncier rural (LDFR ou la loi sur le droit foncier rural; RS 211.412.11) exigeait une offre ferme au sens de droit civil de la part de l'exploitant à titre personnel en réponse à la publication de l'appel d'offres public. Or, X.________ n'avait formulé qu'une déclaration d'intention qui comportait, au surplus, différentes réserves; celle-ci ne pouvait être considérée comme une offre ferme. Au regard de la jurisprudence qui n'admettait que de manière restrictive la qualité pour recourir des personnes non mentionnées à l'art. 83 al. 3 LDFR, les juges précédents ont nié cette qualité à l'intéressé.
C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, X.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, de réformer l'arrêt du 27 juin 2018 du Tribunal cantonal en ce sens que le recours formé le 27 juin 2017 devant cette autorité est recevable, la qualité pour recourir lui étant reconnue et de renvoyer la cause à ce tribunal pour une nouvelle décision dans le sens des considérants; subsidiairement, d'annuler ledit arrêt et de renvoyer la cause au Tribunal cantonal pour une nouvelle décision dans le sens des considérants.
B.________, C.Y.________, D.Y.________ et E.Y.________, ainsi que A.________ SA concluent au rejet du recours. La Commission foncière s'en remet à justice tant sur la recevabilité que sur le fond du recours. Le Chef du Département de l'économie, de l'innovation et du sport du canton de Vaud a renoncé à prendre position.
Par ordonnance du 19 septemb re 2018, le Président de la IIe Cour de droit public a rejeté la requête d'effet suspensif, mais a interdit, à titre de mesures provisionnelles, au Conservateur du registre foncier de La Côte d'inscrire toute mention ou annotation concernant les parcelles nos ** et *** de la Commune de F.________, à savoir en particulier d'inscrire en qualité de propriétaire desdites parcelles la société A.________ SA, jusqu'à droit connu dans la présente procédure.
Les parties se sont encore prononcées par écriture du 9 novembre...

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