Arret Nº 2C 444/2021 Tribunal fédéral, 19-10-2021

Judgement Number2C 444/2021
Date19 octobre 2021
Subject MatterInstruction et formation professionnelle Harcèlement scolaire; qualité de partie en cas de dénonciation devant l'autorité de surveillance des écoles privées; injonction de garder le secret
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
2C_444/2021
Arrêt du 19 octobre 2021
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux
Seiler, Président, Aubry Girardin et Beusch.
Greffier : M. Wiedler.
Participants à la procédure
1. A.A.________,
2. B.A.________,
tous les deux représentés par Me Romain Jordan, avocat,
recourants,
contre
Département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse,
rue de l'Hôtel-de-Ville, 1204 Genève,
et
Association C.________,
représenté par Me Daniel Udry, avocat,
intimée.
Objet
Harcèlement scolaire; qualité de partie en cas de dénonciation devant l'autorité de surveillance des écoles privées; injonction de garder le secret
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 2ème section, du 20 avril 2021
(ATA/427/2021).
Faits :
A.
A.a. L'Association C.________ a pour but l'exploitation d'un collège en vue d'y installer des oeuvres de charité, d'instruction publique générale et de religion. Elle exploite l'école privée D.________ (ci-après: l'Ecole privée).
A.b. A.A.________ et B.A.________ sont les parents de E.A.________ et F.A.________, nées respectivement en 2011 et en 2015. Elles ont été scolarisées au sein de l'Ecole privée, la première dès l'année scolaire 2014-2015 et la deuxième dès l'année 2018-2019.
E.A.________ et F.A.________ ont toutes deux été victimes de comportements agressifs et d'actes de violence de la part de deux de leurs camarades. Les époux A.________ ont signalé ces faits à la direction de l'Ecole privée à plusieurs reprises à partir d'octobre 2017.
B.
B.a. Le 2 juillet 2020, les époux A.________ ont interpellé le Département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse de la République et canton de Genève (ci-après: le Département) afin de lui faire part de la situation, déplorant que l'Ecole privée n'ait mis en place aucun suivi des élèves dont le comportement était dénoncé, ni pris aucune mesure adéquate à leur encontre ou dans le but de protéger les autres élèves. Ils ont sollicité l'ouverture d'une instruction.
Le 1er septembre 2020, le Département, agissant par le Service de l'enseignement privé, a expliqué avoir été informé qu'un certain nombre de démarches avaient été entreprises par la direction de l'Ecole privée et que, sur la base des éléments transmis par celle-ci, il avait estimé que les dispositions légales et réglementaires relatives à l'enseignement privé avaient été respectées.
B.b. Le 23 septembre 2020, les époux A.________ ont contesté l'appréciation du Département et ont demandé que la violation par l'Ecole privée de ses obligations soit constatée.
Par décision du 28 octobre 2020, le Département a constaté que l'Ecole privée n'avait pas violé ses obligations légales et réglementaires relatives à l'enseignement privé dans le cadre de la prise en charge et de la gestion de la situation dénoncée par les époux A.________ en juillet 2020.
B.c. Le 30 novembre 2020, les époux A.________ ont recouru auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) contre la décision du Département. Lors des échanges d'écritures, l'Association C.________ a notamment sollicité le prononcé d'une obligation de garder le secret à l'égard des recourants et de leur conseil s'agissant de tous les faits et éléments relatifs à la situation personnelle des enfants mis en cause, amenés dans le cadre de la procédure à compter du dépôt de la dénonciation le 2 juillet 2020.
Par arrêt du 20 avril 2021, la Cour de justice a déclaré irrecevable le recours formé par les époux A.________ et a fait obligation aux parties à la procédure de garder secret dès le prononcé de l'arrêt, tous les éléments permettant de déterminer l'identité des mineurs, les intervenants et l'établissement concernés, sous les menaces de la peine prévue par l'art. 292 CP.
C.
A.A.________ et B.A.________ déposent un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Ils concluent, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt de la Cour de justice du 20 avril 2021 et au renvoi de la cause à cette juridiction afin qu'elle statue sur le fond.
La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le Département se rallie au dispositif de l'arrêt attaqué. L'Association C.________ conclut, sous suite de frais et dépens, au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt attaqué. Les recourants persistent intégralement dans les conclusions de leur recours.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 I 89 consid. 1).
1.1. L'arrêt attaqué prononce l'irrecevabilité du recours formé par les recourants, d'une part. D'autre part, il fait obligation aux parties de garder secret tous les éléments permettant de déterminer l'identité des mineurs, des intervenants et de l'établissement concernés, sous les menaces de la peine prévue par l'art. 292 CP. La Cour de justice a ainsi rendu deux prononcés distincts et indépendants.
Dans leur mémoire, les recourants développent des griefs à l'encontre de ces deux aspects de la décision attaquée. La recevabilité du recours doit donc être examinée au regard de ces deux objets.
1.2. Est à l'origine de la présente affaire la décision constatant que l'Ecole privée n'a pas violé ses obligations légales et réglementaires dans le cadre de la situation dénoncée par les recourants. Cette décision a été prise par le Département, agissant par le Service de l'enseignement privé, qui est l'autorité cantonale de surveillance des écoles privées conformément aux art. 7 et 43 de la loi genevoise du 17 septembre 2015 sur l'instruction publique (LIP; RSG C 1 10) et aux art. 11 et 12 du règlement du 27 août 2008 relatif à l'enseignement privé (REPriv; RSG C 1 10.83). Quant à la décision de la Cour de justice faisant obligation aux parties de garder le secret, elle a été prise en application de l'art. 20A de la loi genevoise du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative (LPA/GE; RSG E 5 10).
Le fond des deux prononcés de la Cour de justice relève donc du droit public au sens de l'art. 82 let. a LTF et ne tombe pas sous le coup d'une des exceptions prévues à l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est en principe ouverte.
1.3. En vertu de l'art. 89 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est particulièrement atteint par la décision attaquée (let. b) et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (let. c). Dans une procédure administrative, l'auteur d'un recours déclaré irrecevable pour défaut de qualité pour agir est habilité à contester l'arrêt d'irrecevabilité par un recours en matière de droit public lorsque l'arrêt au fond de l'autorité intimée aurait pu être déféré au Tribunal fédéral par cette voie (ATF 135 II 145 consid. 3.2; 131 II 497 consid. 1; 124 II 499 consid. 1b; arrêts 2C_709/2020 du 18 juin 2021 consid. 1.1; 2C_990/2020 du 4 juin 2021 consid. 1.1).
En l'espèce, les recourants, qui ont pris part à la procédure devant l'autorité précédente, ont un intérêt digne de protection à demander l'annulation de l'arrêt attaqué afin d'obtenir qu'il soit statué sur le fond de leur cause, cela indépendamment et sans préjudice du motif d'irrecevabilité retenu en procédure administrative, qui constitue l'objet de la contestation devant le Tribunal fédéral, et à l'exclusion du fond de l'affaire (ATF 135 II 145 consid. 3.1; 133 V 239 consid. 4 et les arrêts cités; arrêts 2C_709/2020 du 18 juin 2021 consid. 1.2; 2C_990/2020 du 4 juin 2021 consid. 1.2). Par ailleurs, ils ont...

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