Arret Nº 1C 518/2018 Tribunal fédéral, 14-04-2020

Judgement Number1C 518/2018
Date14 avril 2020
Subject MatterÉquilibre écologique autorisation de construire une installation de téléphonie mobile
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
1C_518/2018
Arrêt du 14 avril 2020
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président,
Fonjallaz, Kneubühler, Haag et Müller.
Greffière : Mme Sidi-Ali.
Participants à la procédure
A.________,
B.________,
C.________,
D.________,
E.________,
F.________,
tous représentés par Me Nicolas Saviaux, avocat,
recourants,
contre
Salt Mobile SA,
intimée,
Municipalité d'Orbe, Hôtel de Ville, case postale 32, 1350 Orbe, représentée par Me Jean-Daniel Théraulaz, avocat,
Direction générale de l'environnement du canton de Vaud (DGE/DIREV), Division support stratégique, Service juridique, rue Caroline 11, 1014 Lausanne,
A.H.________et B.H.________,
A.I.________ et B.I.________,
Objet
autorisation de construire une installation de téléphonie mobile,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton
de Vaud, Cour de droit administratif et public,
du 4 septembre 2018 (AC.2017.0167).
Faits :
A.
A.I.________, B.I.________, B.H.________ et A.H.________ sont propriétaires de la parcelle n° 934 de la commune d'Orbe. Ce terrain est colloqué en zone d'habitation collective par le plan général d'affectation en vigueur. Il s'y trouve un bâtiment d'habitation et deux garages collectifs.
Le 6 juillet 2016, les propriétaires ont déposé auprès de la Municipalité d'Orbe une demande de permis de construire une nouvelle station de base de téléphonie mobile à installer sur le toit du bâtiment d'habitation. Selon les plans au dossier, établis par le bureau technique J.________, il s'agit d'un mât fixé à la charpente, dépassant de 2,95 m environ le niveau du faîte. Ce projet a été conçu pour le compte de la société Salt Mobile SA.
Mis à l'enquête publique du 27 août au 26 septembre 2016, le projet a suscité de nombreuses oppositions. La Direction cantonale vaudoise de l'environnement industriel, urbain et rural, division Air, climat et risques technologiques (DGE-ARC) a délivré l'autorisation spéciale requise. Ce préavis retient, sur la base des données figurant dans la fiche de données spécifique au site, que le projet (avec six antennes, trois de 800-900 MHz et trois de 1800-2100 MHz) respecte la valeur limite de l'installation fixée par l'ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant du 23 décembre 1999 (ORNI; RS 814.710). Il était demandé à l'opérateur responsable de l'installation de faire procéder à des mesures de contrôle du rayonnement non ionisant dans les six mois suivant la mise en exploitation; il était aussi demandé que l'installation soit intégrée à un système d'assurance qualité conformément à la circulaire du 16 janvier 2006 de l'Office fédéral de l'environnement (OFEV). Le préavis ajoutait, en relation avec une convention signée le 24 août 1999 entre les opérateurs de téléphonie mobile et l'Etat de Vaud (concernant la coordination des emplacements des antennes de téléphonie mobile) qu'il n'y avait "pas d'autres sites prévus à coordonner".
B.
Par décision du 28 mars 2017, la municipalité a refusé de délivrer le permis de construire. Tout en indiquant que les arguments des opposants "concernant leurs craintes liées aux nuisances de l'installation" devaient être écartés, la municipalité, à l'appui de sa décision, a déploré l'absence de planification de l'ensemble des antennes de téléphonie mobile et considéré qu'il était nécessaire d'éviter l'enlaidissement du territoire.
Salt Mobile SA a saisi la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois (CDAP). Devant cette instance, les opposants ont relevé de nombreuses erreurs dans la "fiche de données spécifique au site" au sens de l'art. 11 ORNI, document devant faire état du rayonnement électrique prévisible aux alentours de l'installation; ils ont à cet égard déposé une plainte pénale pour faux dans les titres et tentative d'escroquerie au procès contre notamment l'opératrice de téléphonie mobile et le bureau technique ayant établi la fiche. Salt Mobile SA a alors produit une nouvelle fiche de données spécifique au site, rectifiée. Par arrêt du 4 septembre 2018, la CDAP a admis le recours, annulé la décision attaquée et renvoyé le dossier à la commune pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Elle a en substance jugé qu'aucun intérêt public prépondérant n'était avancé par la commune sous l'angle de l'esthétique pour justifier le refus et n'en voyait elle-même au demeurant aucun; en outre, aucune exigence de coordination ne pouvait s'opposer au projet prévu. Les conditions posées par la législation sur la protection de l'environnement étaient au surplus respectées, de sorte que la commune devait délivrer l'autorisation.
C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________, B.________, C.________, D.________, E.________ et F.________ demandent au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt cantonal en ce sens que le recours cantonal de Salt Mobile SA est déclaré irrecevable (I), subsidiairement en ce sens qu'il est rejeté (II). Ils prennent à titre subsidiaire des conclusions en annulation de l'arrêt cantonal (III). Enfin, "pour autant que de besoin", ils concluent à la réforme de la décision du juge instructeur de la CDAP refusant de suspendre la procédure jusqu'à décision pénale entrée en force sur la procédure initiée par le dépôt de leur plainte pénale en ce sens que la suspension est admise, subsidiairement à l'annulation de cette décision (IV).
La cour cantonale renonce à se déterminer et se réfère aux considérants de son arrêt. La DGE-ARC émet quelques brefs commentaires sur le recours. La commune s'exprime sur le recours et s'en remet à justice. L'intimée Salt Mobile SA se détermine et conclut au rejet du recours. Les intimés propriétaires de l'immeuble concerné ne se manifestent pas. Consulté, l'OFEV se détermine et indique dans un premier temps avoir procédé à ses propres calculs d'intensité du champ électrique. Il produit, avec ses deuxièmes écritures, la fiche de données spécifique au site qu'il a établie. Les parties et autorités concernées s'expriment au cours de plusieurs nouveaux échanges d'écritures et persistent dans leurs conclusions respectives.
Par ordonnance du 5 novembre 2018, le Président de la Ire Cour de droit public a admis la requête d'effet suspensif formulée par les recourants.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité des recours qui lui sont soumis.
1.1. Le recours en matière de droit public est recevable contre les décisions qui mettent fin à la procédure (art. 90 LTF) ou contre les décisions partielles (art. 91 LTF). En vertu de l'art. 93 al. 1 LTF, les décisions incidentes notifiées séparément qui ne portent pas sur la compétence ou sur une demande de récusation ne peuvent faire l'objet d'un recours en matière de droit public que si elles peuvent causer un préjudice irréparable (let. a), ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. b).
L'arrêt attaqué est une décision incidente vu le renvoi qu'il comporte à l'autorité inférieure (arrêt attaqué, ch. II du dispositif). Pour ce motif, le recours est en principe irrecevable sous réserve que la décision remplisse les conditions de l'art. 93 al. 1 let. a ou b LTF. Selon la jurisprudence, cause un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF la décision qui contient des injonctions précises et ne laisse aucune marge de manoeuvre à l'autorité inférieure à laquelle la cause est renvoyée (cf. ATF 142 II 20 consid. 1.2 p. 23 s.; 140 V 282 consid. 4.2 p. 286). Tel est le cas en l'espèce puisque la cour cantonale a annulé la décision de la commune et lui a renvoyé le dossier "pour qu'elle délivre le permis de construire" (arrêt attaqué, ch. 9 p. 30).
1.2. Pour le reste, rendu dans une cause de droit public, le recours est recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Les recourants ont pris part à la procédure devant l'instance cantonale; ils sont particulièrement atteints par l'arrêt attaqué et ont un intérêt digne de protection à sa modification, celui-ci annulant la décision de refus de permis de construire pour ériger une antenne de téléphonie mobile sur le toit d'un immeuble dont ils sont voisins en qualité de propriétaires ou de locataires. Ils ont ainsi qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF.
Les autres conditions de recevabilité sont réunies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière sur le recours.
2.
Dans un premier grief, les recourants se plaignent d'arbitraire dans l'application du droit cantonal procédural s'agissant de la reconnaissance à l'intimée de sa qualité pour recourir devant la cour cantonale. Les recourants considèrent que la qualité pour recourir ne devait pas lui être reconnue car elle n'aurait pas pris part à la procédure devant l'instance précédente au sens où le droit cantonal le prévoit.
2.1.
2.1.1. Sous réserve des cas visés à l'art. 95 let. c à e LTF, la violation du droit cantonal ou communal ne constitue pas un motif de recours. Il est néanmoins possible de faire valoir que l'application des dispositions cantonales ou communales consacre une violation d'une norme de droit fédéral au sens de l'art. 95 let. a LTF, telle que l'art. 9 Cst. garantissant la protection contre l'arbitraire (ATF 138 V 67 consid. 2.2 p. 69; 134 II 349 consid. 3 p. 351).
Appelé à revoir l'application d'une norme cantonale ou communale sous l'angle de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En...

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