Arret Nº 1C 156/2019 Tribunal fédéral, 26-11-2019

Judgement Number1C 156/2019
Date26 novembre 2019
Subject MatterAménagement du territoire et droit public des constructions Permis de construire
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
1C_156/2019
Arrêt du 26 novembre 2019
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président,
Kneubühler et Haag.
Greffier : M. Alvarez.
Participants à la procédure
A.________, représenté par Me Sara Giardina, avocate,
recourant,
contre
1. B.________, représentée par Maîtres Philippe Reymond et Laurent Butticaz, avocats,
2. A.C.________, B.C.________ et C.C.________,
intimés,
Municipalité de Gilly, représentée par Me Jean-Michel Henny, avocat,
Objet
Permis de construire,
recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif
et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud
du 11 février 2019 (AC.2017.0281 - AC.2017.0282).
Faits :
A.
A.C.________, B.C.________ et C.C.________ sont propriétaires de la parcelle n º 253 du registre foncier, sur le territoire de la Commune de Gilly. D'une surface de 2'311 m 2, celle-ci est classée en zone village selon le plan des zones (ou plan général d'affectation [ci-après: PGA]) approuvé par le Conseil d'Etat du canton de Vaud, le 14 août 1985. Elle supporte un bâtiment d'habitation actuellement vide (n° ECA 18) ainsi qu'une ancienne porcherie (n° ECA 19); le reste du terrain est un pré. Le bâtiment ECA n º 18, situé à l'extrémité nord de la parcelle, borde la route de Rolle, voie publique traversant le centre du village. Le chemin des Cerisiers, route communale desservant des quartiers d'habitation, passe quant à lui au sud de la parcelle n º 253.
B.
A.C.________, B.C.________ et C.C.________ ont conclu une promesse de vente portant sur cet immeuble avec la société B.________. En février 2015, cette dernière a soumis à la Municipalité de Gilly un avant-projet de construction sur ce fonds. Les 9 mars et 15 juin 2015, la municipalité a fait part de certaines remarques à B.________ et lui a communiqué des préavis de la Commission communale consultative en matière d'urbanisme et d'architecture (CCCUA). En fonction de ces avis, le 12 décembre 2016, B.________ a déposé une demande de permis de construire pour l'ouvrage suivant: "construction d'un immeuble Minergie de 16 appartements, parking souterrain avec 32 places de parc pour véhicules, aménagements extérieurs [...]. Rénovation du bâtiment ECA n° 18 en 1 appartement. Démolition d'un couvert à animaux et d'une fontaine. Création d'un passage piéton privé reliant la route de Rolle au chemin des Cerisiers".
Le projet a été mis à l'enquête publique du 21 janvier au 19 février 2017. Celui-ci a fait l'objet de plusieurs oppositions, dont celle formée par A.________, propriétaire, avec son père, de la parcelle n º 257, contiguë à l'est.
Les autorisations spéciales et préavis délivrés par les services concernés de l'administration cantonale ont fait l'objet d'une synthèse CAMAC du 23 février 2017.
Le 19 juin 2017, la municipalité a délivré le permis de construire requis; par décision du même jour, elle a par ailleurs rejeté les oppositions.
Par acte du 23 août 2017, A.________ a porté la cause devant la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud. Son recours a été joint à celui formé par d'autres opposants, également voisins du projet. Dans le cadre de l'instruction, la cour cantonale a procédé à une inspection locale, le 20 décembre 2018.
C.
Une procédure de planification a été engagée à Gilly, en vue de l'établissement d'une zone réservée au sens de l'art. 46 de la loi du 4 décembre 1985 sur l'aménagement du territoire et les constructions (LATC; RS/VD 700.11). La municipalité a fait paraître dans la Feuille des avis officiels (FAO) du 2 septembre 2016 un avis aux propriétaires dont le texte est le suivant:
"Afin de se mettre en conformité avec le Plan directeur cantonal et la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT), la Municipalité informe les propriétaires fonciers que la révision du plan général d'affectation (PGA) est en cours.
Dès lors, la Municipalité se réserve le droit de refuser tout projet qui contreviendrait aux dispositions envisagées par la planification de la révision du PGA, ceci conformément à la législation en vigueur.
Pour cette raison et afin d'éviter des frais, les propriétaires sont priés de contacter la Municipalité avant l'élaboration de tout projet".
Le 20 juin 2017, soit le lendemain de l'octroi du permis de construire sollicité par B.________, le conseil communal a pris en considération une motion visant à "créer une zone réservée sur l'ensemble du territoire communal pour une durée de 5 ans prolongeable 3 ans". La municipalité y a donné suite et a élaboré un plan de zone réservée; son périmètre inclut toutes les parcelles classées dans la zone du village et dans la zone de villas du PGA, ainsi que les terrains de trois plans d'affectation spéciaux ("Village Sud", "Les Courbes" et "Sous Gilly"). La justification de la zone réservée a été exposée dans un rapport d'aménagement au sens de l'art. 47 de l'ordonnance sur l'aménagement du territoire du 28 juin 2000 (OAT; RS 700.1). Ce document rappelle que, selon le plan directeur cantonal (PDCn), il appartient aux communes d'adapter leurs zones à bâtir en fonction de leur capacité d'accueil en habitants et la croissance démographique projetée pour la période 2015-2036 (cf. PDCn, 4ème adaptation, approuvée le 31 janvier 2018 par le Conseil fédéral [FF 2018 959], Mesure A11, p. 48). A cet égard, le rapport retient une population de 1'131 habitants au 31 décembre 2015; compte tenu d'une croissance annuelle de 0.75%, la population maximale admissible au 31 décembre 2036 est, quant à elle, fixée à 1'309 habitants.
Au 31 juillet 2017, la population de Gilly atteignait 1'298 habitants. Les constructions en cours permettaient l'accueil d'une centaine d'habitants supplémentaires, de sorte que le maximum fixé pour l'horizon 2036 était d'ores et déjà atteint.
Il a été décidé de classer l'ensemble des zones à bâtir pour l'habitation dans la zone réservée. Toutefois, deux parcelles ont été soumises à un régime particulier, à savoir la parcelle n º 482 (au nord du village) et la parcelle n º 253, concernée par le projet de B.________. Pour ces deux parcelles, l'art. 2 al. 2 du règlement de la zone réservée (RZR) rappelle qu'elles font actuellement l'objet d'une procédure de recours au tribunal pour la délivrance de permis de construire; en cas de refus de l'autorisation, le régime de la zone réservée leur sera applicable.
Mis à l'enquête publique le 21 octobre 2017 - soit environ 4 mois après la délivrance de l'autorisation de construire à B.________ -, le plan de la zone réservée a suscité plusieurs oppositions. Dans sa séance du 20 mars 2018, le Conseil communal de Gilly a adopté ce plan et rejeté les oppositions. Le 5 juin 2018, la Cheffe du Département cantonal du territoire et de l'environnement (DTE) a approuvé préalablement la zone réservée, en exposant notamment que la zone à bâtir d'habitation et mixte permettait d'accueillir environ 600 habitants supplémentaires, ce qui représentait un excédent d'environ 530 habitants à l'horizon 2036; la commune était partant tenue d'adapter sa zone à bâtir en application de l'art. 15 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT; RS 700). L'affectation du territoire sis en zone d'habitation et mixte à la zone réservée permettait à la commune d'engager la révision de son PGA de manière réfléchie, à partir de la situation actuelle temporairement figée.
Les décisions d'adoption et d'approbation préalable de la zone réservée ont fait l'objet de plusieurs recours au Tribunal cantonal - dont deux toujours pendants - lesquels ne concernent cependant pas la présente procédure, limitée à la délivrance d'une autorisation de construire sur la parcelle n º 253, confirmée par l'arrêt cantonal du 11 février 2019.
D.
Contre ce dernier arrêt, A.________ forme un recours de droit public. Il demande principalement au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt attaqué en ce sens que la décision municipale du 19 juin 2017, accordant le permis de construire requis par B.________, est annulée. Subsidiairement, il conclut au renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision.
Le Tribunal cantonal renonce à se déterminer et se réfère aux considérants de son arrêt. La Municipalité de Gilly s'en remet à justice. La constructrice intimée conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. Aux termes d'un second échange d'écritures, le recourant et la constructrice intimée persistent dans leurs conclusions respectives. Sans formuler d'observations ni prendre de conclusions formelles, les intimés A.C.________, B.C.________ et C.C.________ supportent les décisions de la commune et de l'administration cantonale et adhèrent à la position de la société B.________.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF). Il contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 141 II 113 consid. 1 p. 116).
Le recourant a qualifié son écriture de recours de droit public. Comme le souligne à juste titre la constructrice intimée, cette voie de droit est absente de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Cette erreur dans l'intitulé de l'acte de recours demeure cependant sans conséquence pour le recourant, son écriture répondant sur le principe aux conditions de recevabilité du recours en matière de droit public (cf. ATF 131 I 291 consid. 1.3 p. 296; 126 II 506 consid. 1a p. 508; arrêt 1C_231/2018 du 13 novembre 2018 consid. 1).
Le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF), comme en attestent les références...

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