Arrêt nº 4A 13/2018 de Tribunal Fédéral, 23 octobre 2018

Date de Résolution23 octobre 2018

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Ecriture agrandie

Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

4A_13/2018, 4A_17/2018

Arrêt du 23 octobre 2018

Ire Cour de droit civil

Composition

Mmes les Juges fédérales

Kiss, Présidente, Klett, Hohl, Niquille et May Canellas.

Greffier : M. Piaget.

4A_13/2018

Participants à la procédure

A.________,

représenté par Me Pierre Gabus,

recourant,

contre

X.________ Sàrl,

représentée par Me Stéphanie Fuld,

intimée

et

4A_17/2018

X.________ Sàrl,

représentée par Me Stéphanie Fuld,

recourante,

contre

A.________,

représenté par Me Pierre Gabus,

intimé.

Objet

convention de résiliation du contrat de travail ou transaction sur la fin des rapports de travail,

concessions équivalentes (art. 341 al. 1 CO);

recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre des prud'hommes, du 21 novembre 2017

(C/10996/2014-3 CAPH/185/2017).

Faits :

A.

A.a. X.________ Sàrl (ci-après: X.________ ou l'employeuse ou la défenderesse), dont le siège est à Genève, est une société active dans le négoce de marchandises, notamment de matières premières, ainsi que de fret et de leurs dérivés.

A.________ (ci-après: l'employé ou le demandeur) a été engagé comme traderen pétrole par X.________ le 3 septembre 2010, pour un salaire fixe de 300'000 fr. par an.

Le contrat de travail prévoit le versement d'un bonus discrétionnaire en ces termes:

" L'employé n'a pas de droit contractuel à un bonus mais peut recevoir un tel montant, au moment et aux conditions déterminés à la discrétion absolue de la société. De tels paiements de bonus, s'il y en a, ne constituent pas une partie du salaire. Des paiements consécutifs sur plusieurs années ne créent pas de droit à de futurs paiements ".

A.b. Au cours de sa première année d'activité, soit 2011 (les comptes de la société comprenant la période du 1er novembre de l'année précédente au 31 octobre), l'employé et son équipe n'ont pas généré de bénéfices et aucun bonus ne leur a été versé l'année suivante.

Au cours de l'année 2012, l'employé et son équipe ont généré un bénéfice. Le 8 novembre 2012, l'employé a transmis une proposition de répartition du bonus pour ses collaborateurs, tenant compte essentiellement de leur performance et indiquant que l'objectif était de les retenir dans leur poste et de maintenir leur motivation à haut niveau.

Par courrier de l'employeuse du 10 décembre 2012, signé par l'employé le 21 décembre 2012( bonus agreement), l'employeuse a fixé le bonus dû à l'employé, sur la base des chiffres de l'année comptable 2012, au montant de 3'750'000 USD, lequel comprend un bonus ( incentive compensation) de 1'650'000 USD payable au plus tard le 31 janvier 2013 (1ère tranche) et un bonus de 2'100'000 USD ( additional bonus payment), payable à raison de 1'050'000 USD le 31 janvier 2014 (2e tranche) et 1'050'000 USD le 31 janvier 2015 (3e tranche). Le paiement de ces montants était soumis aux conditions que l'employé ne donne pas sa démission ou qu'il ne fasse pas l'objet d'un licenciement avant le 31 décembre de l'année précédant la date du paiement. Il était précisé que la société pouvait à sa seule discrétion autoriser le versement de tout ou partie du bonus additionnel si la résiliation avant le 31 décembre avait eu lieu pour un motif autre que grave. La question de l'application de ces conditions est litigieuse entre les parties.

Il a été retenu qu'il était d'usage pour la société employeuse de différer le paiement du bonus en trois versements sur une période de trois ans dans les cas de bonus supérieurs à 500'000 USD.

A.c. Le 16 novembre 2013, l'employeuse a résilié le contrat de travail de l'employé pour le 31 janvier 2014, congé ordinaire confirmé par courriers du 18 novembre 2013, lesquels n'en précisent pas les motifs.

Par courrier du 18 novembre 2013, l'employeuse a soumis à l'employé un accord que l'employé a signé le 10 décembre 2013. Selon cet accord (termination agreement), l'employé percevrait son salaire mensuel de 25'000 fr. jusqu'en janvier 2014 et le bonus additionnel de 1'050'000 USD lui serait versé pour autant que les termes et conditions de l'accord soient respectés.

Deux clauses de cet accord, à savoir la clause de renonciation de l'employé à agir en justice et celle de restitution par l'employé du montant de 1'050'000 USD en cas de non-respect de la clause de renonciation, sont litigieuses:

" L'employé déclare, s'engage et garantit qu'il n'a déposé ni présenté, ni ne va déposer ou présenter aucune autre plainte, procédure, action ou prétention devant quelque tribunal que ce soit, juridiction du travail ou toute autre juridiction en connexion avec, ou en lien avec ou découlant de l'emploi et/ou sa résiliation et que nulle personne agissant pour son compte ne le fait non plus... "

" L'employé s'engage à rembourser le paiement du bonus prévu.... immédiatement sur demande dans le cas où l'employé, ou quiconque agissant pour son compte, intente une action, une réclamation ou une procédure par-devant la juridiction du travail ou toute autre juridiction contre la société.... ou si l'employé affirme... que cette convention de résiliation n'est pas valide ou si une cour ou un tribunal en décide ainsi.... "

A.d. Ainsi, en 2013, l'employé a perçu son salaire de 300'000 fr. et le bonus de 1'650'000 USD (1ère tranche), soit 1'528'726 fr. 15 versés en janvier 2013.

En 2014, il a perçu son salaire de 25'000 fr. et, en exécution de l'accord des 18 novembre/10 décembre 2013, il a reçu le montant de 1'050'000 USD (2e tranche), soit 940'262 fr. versés le 24 janvier 2014.

A.e. L'employé a formé opposition à son licenciement, par courrier de son avocat du 27 janvier 2014, et a requis que les motifs de celui-ci lui soient communiqués.

Par courrier de son mandataire du 7 février 2014, l'employeuse a communiqué que le licenciement avait été prononcé pour trois motifs: les pertes éprouvées en lien avec l'activité de l'employé, le comportement de celui-ci et le non-respect de certaines règles internes; elle a invité l'employé à lui restituer le montant de 1'050'000 USD dans la mesure où l'accord passé avait été invalidé.

A.f. L'employé a retrouvé un emploi en novembre 2014, dans le même domaine, avec une rémunération inférieure.

B.

Par requête de conciliation du 22 mai 2014, l'employé a ouvert action en paiement contre son employeuse, puis, après échec de la conciliation, a déposé sa demande devant le Tribunal des prud'hommes de Genève le 30 juillet 2014, concluant, dans ses conclusions finales, à la condamnation de celle-ci à lui verser, à son choix à lui le montant brut de 951'615 fr. ou de 1'050'000 USD à titre de bonus (la 3e tranche du bonus) et le montant brut de 716'437 fr. 50 à titre d'indemnité pour licenciement abusif, tous montants avec intérêts à 5% l'an dès le 31 janvier 2014.

L'employeuse a conclu au rejet de la demande et a formé une demande reconventionnelle, concluant à ce que le demandeur soit condamné à lui verser 886'761 fr. 10, subsidiairement 989'625 fr. 40, avec intérêts à 5% l'an dès le 16 février 2014, autrement dit à lui restituer le montant net (après déduction des cotisations sociales) versé en exécution de l'accord des 18 novembre/10 décembre 2013.

Par jugement du 2 février 2016, le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève a rejeté tant la demande de l'employé que la demande reconventionnelle de l'employeuse. Selon lui, le paiement des deuxième et troisième tranches du bonus n'était pas dû puisque l'employé avait été licencié avant le 31 décembre 2013. Le congé signifié par l'employeuse n'était pas abusif et aucune indemnité n'était donc due à ce titre. Quant à la demande reconventionelle, il l'a rejetée: l'employeuse n'avait aucun intérêt à prévoir le remboursement d'une somme aussi importante (1'050'000 USD) pour se protéger et, partant, cette clause qui impose un engagement excessif au travailleur, était nulle.

Statuant le 21 novembre 2017, la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice de Genève a rejeté l'appel de l'employé et confirmé le jugement attaqué. Les motifs en seront exposés ci-après dans la mesure utile.

C.

Contre cet arrêt, tant l'employé que l'employeuse ont interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral.

L'employé conclut à sa réforme en prenant en substance les conclusions suivantes: au titre de bonus, principalement, l'employeuse doit être condamnée à lui payer, à son choix à lui, les montants bruts de 951'615 fr. ou de 1'050'000 USD, subsidiairement le montant de 951'615 fr., plus subsidiairement le montant de 1'050'000 USD, tous montants portant intérêts à 5% l'an dès le 31 janvier 2014, et au titre d'indemnité pour licenciement abusif le montant de 716'437 fr. 50 avec intérêts à 5% l'an dès le 31 janvier 2014.

L'employeuse conclut à la réforme de l'arrêt attaqué en ce sens que, principalement, le demandeur soit condamné à lui payer le montant net de 886'761 fr. 10, subsidiairement de 989'625,40 USD, avec intérêts à 5% l'an dès le 16 février 2014, lequel correspond à la restitution du montant versé en exécution de l'accord des 18 novembre/10 décembre 2013, et plus subsidiairement encore à son annulation et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Les parties ont chacune conclu au rejet du recours de l'autre et, dans chaque dossier, ont encore déposé chacune des observations. La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt.

Considérant en droit :

  1. Les recours étant tous deux dirigés contre le même arrêt et les questions juridiques qui se posent portant essentiellement sur les mêmes objets...

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