Arrêt nº 4A 139/2012 de Ire Cour de Droit Civil, 8 juin 2012

ConférencierPublié
Date de Résolution 8 juin 2012
SourceIre Cour de Droit Civil

Chapeau

138 III 461

68. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause X. SA et Y. SA contre Z. SA (recours en matière civile)

4A_139/2012 du 8 juin 2012

Faits à partir de page 461

BGE 138 III 461 S. 461

  1. X. SA et Y. SA (ci-après: les demanderesses), sociétés soeurs actives dans le domaine de l'horlogerie, ont réalisé des inventions dans BGE 138 III 461 S. 462

    le domaine du tourbillon. Certains de leurs mouvements intégrant ce dispositif mécanique sont logés dans un boîtier qui présente une protubérance de forme arrondie venant casser le cercle de la boîte. Le design de ce boîtier a fait l'objet d'un dépôt, par les demanderesses, auprès de l'Institut Fédéral de la Propriété Intellectuelle le 25 janvier 2005; il y a été enregistré le 8 mars 2005, puis a été publié le 31 mars 2005 (design suisse no 1).

    A la fin de l'année 2008, les demanderesses ont constaté que la société Z. SA (ci-après: la défenderesse) lançait un modèle de montre présentant une boîte munie d'une protubérance.

  2. Devant la Cour civile du Tribunal cantonal neuchâtelois, les demanderesses, se fondant sur leur design, ont notamment conclu à ce qu'il soit ordonné à la défenderesse de cesser de mettre dans le commerce une montre dont le boîtier présente une protubérance (conclusion no 1), de fournir le nom des fabricants de la boîte litigieuse (no 2), ainsi que tous les documents utiles permettant de déterminer le chiffre d'affaires réalisé par la défenderesse (no 3), à la condamnation de celle- ci à restituer le gain brut réalisé (no 4) et à ce que la confiscation et la destruction du stock de montres en sa possession soient ordonnées (no 5).

    La défenderesse, dans sa réponse et demande reconventionnelle, a notamment conclu au rejet de la demande et à ce que soit déclaré nul le design suisse no 1. Elle est d'avis que son boîtier laisse une impression générale différente de celle du design des demanderesses. Invoquant une tierce antériorité, elle fait également valoir le principe de la priorité du dépôt; selon elle, le design suisse no 2 de A. SA, déposé le 23 novembre 2004 (et enregistré le 8 février 2005, puis publié le 28 février 2005), est prioritaire sur celui des demanderesses, de sorte que celles-ci ne peuvent se prévaloir d'aucun droit.

    Par jugement sur moyen séparé du 9 février 2012, la Cour civile du Tribunal cantonal neuchâtelois a rejeté les conclusions nos 1 et 2 de la demande principale et, donnant suite à la demande reconventionnelle, constaté la nullité du design suisse no 1. En substance, elle a admis que la nullité de l'enregistrement, invoquée par voie d'exception, pouvait être fondée sur l'art. 6 de la loi fédérale du 5 octobre 2001 sur la protection des designs (loi sur les designs, LDes; RS 232.12). Elle a expliqué que la priorité d'un dépôt antérieur valait aussi bien pour des designs identiques que pour des designs similaires qui créent la même impression d'ensemble. Elle a alors observé que le design BGE 138 III 461 S. 463

    déposé par les demanderesses présentait les mêmes caractéristiques que le design déposé antérieurement par A. SA et conclu qu'en raison de cette (tierce) antériorité l'enregistrement des demanderesses était nul.

  3. Les demanderesses exercent un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Elles concluent à l'annulation du jugement entrepris et au renvoi de la cause à la cour précédente. Les recourantes reprochent à celle-ci d'avoir fait une interprétation erronée de l'art. 6 LDes, accordant à cette disposition une portée trop large.

    L'intimée conclut au rejet du recours.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

    (résumé)

    Considérants

    Extrait des considérants:

    2.

    2.1 Aux termes de l'art. 9 al. 1 LDes, le droit à un design confère à son titulaire le droit d'interdire aux tiers l'utilisation du design à des fins industrielles. Par utilisation, on entend notamment la fabrication, l'entreposage, l'offre, la mise en circulation, l'importation, l'exportation, le transit et la possession à ces fins. Le droit prend naissance avec l'enregistrement du design dans le registre suisse (art. 5 al. 1 LDes), ou, si la Suisse est désignée, avec un enregistrement international effectué selon l'Arrangement de La Haye (art. 29 LDes).

    Outre l'enregistrement, la protection légale suppose que le design soit nouveau et original (art. 2 al. 1 LDes). Dès le dépôt de la demande d'enregistrement, le design est présumé nouveau et original (art. 21 LDes).

    2.2 Sur la base de l'art. 33 LDes, celui qui y a un intérêt juridique peut agir en justice afin de faire constater qu'un design enregistré ne bénéficie pas de la protection légale. Ainsi, l'action peut être menée non seulement par le titulaire d'un design antérieur, mais par toute personne qui, en raison du design enregistré, pourrait être entravée dans sa liberté économique (cf. PETER HEINRICH, DesG/HMA, Kommentar, 2002, no 33.79 ad art. 33 LDes).

    Le demandeur peut notamment faire valoir, le cas échéant, que ce design n'est pas nouveau ou pas original; il lui incombe de prouver le défaut de nouveauté ou d'originalité. Il peut notamment...

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