Arrêt de Ire Cour de Droit Civil, 15 février 1966

ConférencierPublié
Date de Résolution15 février 1966
SourceIre Cour de Droit Civil

Chapeau

92 II 1

  1. Arrêt de la Ire Cour civile du 15 février 1966 dans la cause Alex Martin SA contre l'Association suisse des fabricants de cigarettes.

    Faits à partir de page 2

    BGE 92 II 1 S. 2

    A.- Comme elle subissait une discrimination de prix de la part des fabricants de cigarettes, groupés en une association suisse dont elle refusait de respecter les conditions de vente aux détaillants, la société Alex Martin SA, grossiste en tabacs à Fribourg, assigna l'association devant le Tribunal fédéral, par demande du 6 décembre 1962. Elle concluait à la cessation du boycott et au paiement de dommages-intérêts. Les 9 janvier et 18 novembre 1963, elle chiffra la seconde conclusion à fin octobre 1962, respectivement 1963, réservant le préjudice ultérieur.

    Par arrêt du 16 mars 1965 (RO 91 II 25 sv.), la Ie Cour civile du Tribunal fédéral admit partiellement la demande: l'association refusait à tort au boycotté la bonification de 0,75% à 1,5% prévue par l'art. 13 de la convention conclue entre les fabricants le 15 décembre 1960; elle devait inviter aussitôt ses membres à l'accorder; elle était en outre condamnée à payer à la demanderesse une indemnité de 73 413 fr. 10, qui représentait le dommage causé par la discrimination du 1er avril 1961 au 31 octobre 1962.

    Décidée le 12 janvier 1961 en assemblée générale, la mesure était en effet entrée en vigueur le 1er avril. Dès cette date, les fabricants ont omis la bonification dans les factures destinées à la demanderesse. Celle-ci a donc subi le dommage consécutif à la décision illicite au für et à mesure de leurs livraisons; à réception de chaque facture, elle connaissait exactement le préjudice qui lui était causé.

    En exécution de l'arrêt, la défenderesse a payé, outre le montant qui y est fixé, une indemnité pour la période allant du 1er juillet 1964 au 16 mars 1965. Elle a refusé en revanche de réparer le dommage causé du 1er novembre 1962 au 30 juin 1964, que les parties arrêtent à 90 566 fr. Elle soutient que cette créance était prescrite.

    Le 29 juin 1965, la demanderesse lui a fait notifier un commandement de payer, frappé d'opposition.

    BGE 92 II 1 S. 3

    B.- Les parties étant convenues de saisir directement le Tribunal fédéral, Alex Martin SA a ouvert une seconde action le 9 novembre 1965. La demande tend au paiement de 90 566 fr. avec intérêts à 5% dès le 29 juin 1965. La défenderesse conclut au rejet de l'action.

    Extrait des considérants:

    Considérant en droit:

  2. Seule l'exception de prescription est litigieuse, et plus précisément le point de départ du délai d'un an fixé par l'art. 60 al. 1 CO (en vertu de l'art. 23 al. 1 Lcart.):

    Certains arguments de la demande sont manifestement dépourvus de fondement.

    1. Rétablissant la jurisprudence antérieure à l'arrêt publié au RO 88 II 209, la Cour de céans a reconnu à la défenderesse la qualité d'association au sens des art. 60 sv. CC et, partant, la personnalité juridique et la capacité d'ester en justice (RO 90 II 333). L'incertitude qui a existé sur ce point de droit n'empêche pas que la demanderesse ait eu connaissance de l'auteur du dommage au plus tard le 6 décembre 1962, lorsqu'elle a saisi le Tribunal fédéral en raison de la décision qu'elle jugeait illicite. En effet, pour fixer le point de départ du délai de prescription, l'art. 60 CO vise la connaissance des faits, non de leur qualification juridique.

      Pour la même raison, peu importe que l'illicéité de la discrimination n'ait été définitivement constatée que par l'arrêt du 16 mars 1965. Il suffit, au regard de l'art. 60 CO, que le lésé ait connu en fait la mesure. L'appréciation exacte des bases juridiques de la prétention, notamment de l'illicéité de l'acte dommageable, n'est pas requise (arrêt non publié rendu le 26 juin 1954 dans la cause Bochatay c. Roten).

    2. La réserve de la prétention issue d'un dommage futur, faite au cours du premier procès, ne constitue pas un acte interruptif du cours de la prescription (RO 60 II 202/3; arrêt Schlotz c. Frossard, consid. 10 b, RO 91 II 429).

    3. La demanderesse, enfin, n'allègue aucun fait qui donnerait à penser que la défenderesse, en invoquant la prescription, abuse de son droit au sens que la pratique a fixé.

  3. Le délai de prescription de la créance déduite en justice dans le...

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