Arrêt de IIe Cour de Droit Civil, 13 septembre 1956

ConférencierPublié
Date de Résolution13 septembre 1956
SourceIIe Cour de Droit Civil

Chapeau

82 II 477

65. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 13 septembre 1956 dans la cause Schlaeppi contre Schlaeppi.

Faits à partir de page 478

BGE 82 II 477 S. 478

A.- Marc-Robert Schlaeppi, né le 2 janvier 1883, a eu deux enfants, Anne-Marie et Marc-René, du mariage qu'il a contracté avec Claire Müller le 5 avril 1909. Le divorce des époux Schlaeppi a été prononcé par jugement du 28 septembre 1932.

Le 27 février 1936, Marc-Robert Schlaeppi s'est remarié avec Alice-Joséphine Verdan, née le 27 janvier 1899. Aucun enfant n'est issu de cette union.

Marc-Robert Schlaeppi est décédé à Clarens le 16 janvier 1950. Il a laissé un testament olographe du 27 décembre 1948 qui contient notamment les dispositions suivantes:

Article 2.

Je renvoie mes descendants à leur réserve légale et j'institue ma femme Alice Schlaeppi, née Verdan, comme mon héritière pour le maximum que la loi me permet de lui attribuer dans ma succession.

Ma femme aura en outre le droit de choisir ceux de mes biens qu'elle décidera pour constituer sa part successorale et sa part aux biens matrimoniaux; elle pourra également, comme il lui conviendra, exiger que parties de ses droits soient exercés en usufruit sa vie durant sur ceux de mes biens qu'elle décidera.

BGE 82 II 477 S. 479

Article 3.

Dans son lot, ma fille Anne-Marie aura le droit de demander l'attribution de la petite table à ouvrage venant de ma mère.

Article 4.

A titre de règle de partage, je prescris que ma femme Alice Schlaeppi, née Verdan, aura le droit, sa vie durant, d'habiter gratuitement l'appartement que nous occupons actuellement dans mon immeuble de Clarens; à cet effet, un droit d'habitation sera inscrit au Registre foncier pour lui garantir l'exercice de ses droits.

Article 5.

Je désigne comme mon exécuteur testamentaire Monsieur le notaire Georges Testaz à Montreux. ..

Le lendemain de la rédaction de son testament, le 28 décembre 1948, Marc-Robert Schlaeppi a conclu avec sa seconde femme un contrat de mariage ainsi conçu:

Contrat de mariage

Par devant Georges Testaz, notaire à Montreux, pour le district de Vevey, comparaissent:

d'une part:

M. Marc-Robert fils de Marc Schlaeppi, de Boudry (Neuchâtel) et Gadmen (Berne), ingénieur, domicilié à Clarens, et

d'autre part:

son épouse Mme Alice Joséphine Schlaeppi, fille de François Verdan, des mêmes lieux d'origine et de domicile que le prénommé,

lesquels exposent préliminairement ce qui suit:

I. Ils se sont mariés à Montreux, le vingt-sept février mil neuf cent trente-six et n'ont jamais passé entre eux de contrat de mariage; ils se sont en conséquence soumis au régime matrimonial légal de l'union des biens (articles 178 et 194 suivants du code civil suisse).

II. Au moment du mariage, les apports des époux comparants étaient les suivants, ce que chacun d'eux accepte expressément, savoir:

pour l'époux: un capital net de quarante-sept mille francs (47 000 fr.)

pour l'épouse: une somme totale de six mille francs (6000 fr.) qu'elle a remise à son mari, ce dernier reconnaissant, par les présentes, devoir ladite somme à sa femme; la copie des présentes qui sera remise à l'épouse vaudra entre les mains de cette dernière comme reconnaissance de dette.

Jusqu'à ce jour, les époux comparants n'ont pas fait d'autres apports en mariage, en titres, valeurs ou espèces.

III. Les apports en mobilier des époux sont déterminés par les polices d'assurance contre l'incendie établies au nom de chacun des époux, les dites polices valant réciproquement comme reconnaissance d'apports entre les comparants.

Ceci exposé, les comparants conviennent de ce qui suit:

Article unique.

Le bénéfice prévu à l'article 214 du code civil suisse appartiendra en entier à l'époux survivant.

En paiement de ses apports et de sa part de bénéflce, l'épouxBGE 82 II 477 S. 480

survivant pourra demander l'attribution des biens matrimoniaux qu'il décidera.

En cas de dissolution de l'union conjugale pour une autre cause que le décès de l'un des époux, ledit bénéfice appartiendra en entier au mari.

Les comparants dispensent le notaire soussigné de faire inscrire le présent contrat au registre des régimes matrimoniaux.

Ce contrat a été approuvé par la Justice de paix du cercle de Montreux, en sa qualité d'autorité tutélaire, le 22 janvier 1949.

B.- Le 3 mars 1951, Anne-Marie et Marc-René Schlaeppi ont ouvert action contre dame Alice Schlaeppi-Verdan pour faire reconnaître leur part réservataire dans la succession de leur père, prononcer la nullité, subsidiairement la réductibilité de la disposition du contrat de mariage du 28 décembre 1948 attribuant la totalité du bénéfice de l'union conjugale à l'époux survivant et fixer la consistance du patrimoine paternel. Dame Alice Schlaeppi-Verdan a conclu à ce que le partage des biens laissés par son mari fût opéré conformément aux clauses du contrat de mariage et du testament.

Par jugement du 7 avril 1956, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois a notamment déterminé de quels biens se compose la succession et prononcé que les demandeurs sont héritiers réservataires de leur père, que leur part est, pour chacun d'eux, des 9/32 de la succession, que l'attribution à la défenderesse de la totalité du bénéfice de l'union conjugale constitue, à concurrence des 2/3 de ce bénéfice, une libéralité réductible, que l'attribution à la défenderesse des biens énumérés dans la police d'assurance incendie établie en son nom constitue une libéralité réductible, et que la défenderesse a le droit de prélever, dans la liquidation du régime matrimonial, ses apports en espèces par 6000 fr., les biens mobiliers dont elle établira qu'ils constituent ses apports et, réduction réservée, les biens énumérés dans la police d'assurance incendie à son nom et le bénéfice de l'union conjugale.

C.- Contre ce jugement dame Alice Schlaeppi-Verdan a recouru en réforme au Tribunal fédéral. Elle conclut àBGE 82 II 477 S. 481

ce qu'en modification de la décision attaquée il soit prononcé:

"1. L'attribution à la recourante par le contrat de mariage litigieux du 28 décembre 1948, de la totalité du bénéfice de l'union conjugale est valable et maintenue dans tous ses effets, dite attribution ne constituant pas une libéralité réductible.

2. Les droits des intimés, en leur qualité d'héritiers réservataires de feu Marc-Robert Schlaeppi, représentant pour chacun d'eux 9/32 (neuf trente-deuxièmes) de la succession, portent uniquement sur les apports du défunt, à l'exclusion du bénéfice réalisé au cours de l'union conjugale des époux Schlaeppi-Verdan, lequel bénéfice est attribué en entier à la recourante, avant tout partage.

3. Les apports de feu Marc-Robert Schlaeppi devant faire l'objet du partage entre parties ne comprennent pas les biens et valeurs ci-après:

  1. 30 (trente) actions Ciba sur 60 (soixante) inventoriées au décès, ces trente actions rentrant dans le bénéfice de l'union conjugale.

  2. ..."

Les intimés concluent au rejet du recours.

Extrait des considérants:

Considérant en droit:

1. Selon l'arrêt RO 58 II 1, les époux mariés sous le régime de l'union des biens peuvent convenir par contrat de mariage, en vertu de l'art. 214 al. 3 CC, que tout le bénéfice reviendra au conjoint survivant, et cette disposition n'est pas réductible par application des règles du droit successoral.

Cette opinion est partagée par certains auteurs (GMÜR, Familienrecht, note 34 à l'art. 214, p. 612; ESCHER, Das Erbrecht, notes 6 à l'art. 462, p. 37/38, et 33 à l'art. 527, p. 459; ROSSEL et MENTHA, Manuel du droit civil suisse, vol. I, p...

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