Arrêt nº 4P.47/2006 de Ire Cour de Droit Civil, 2 juin 2006

Date de Résolution 2 juin 2006
SourceIre Cour de Droit Civil

Tribunale federale

Tribunal federal

{T 0/2}

4P.47/2006

Arrêt du 2 juin 2006

Ire Cour civile

Composition

MM. et Mme les Juges Corboz, président, Favre et Kiss.

Greffier: M. Carruzzo.

Parties

les époux A.________,

recourants, représentés par Me Laurent Moreillon,

contre

B.________,

C.________,

intimés,

représentés par Me Pierre del Boca, avocat, Petit-Chêne 18, 1003 Lausanne,

Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Palais de justice de l'Hermitage, route du Signal 8, 1014 Lausanne.

Objet

art. 6 par. 1 CEDH; art. 9, 29 al. 1 et 30 al. 1 Cst.; appréciation des preuves; déni de justice; garanties de procédure,

recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre

des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud du

2 novembre 2005.

Faits:

A.

Par contrat du 27 mai 1986, les époux A.________ (défendeurs) ont confié à l'architecte B.________ (demandeur) le soin d'effectuer des prestations relevant de son art pour la construction d'une villa locative sur un terrain dont ils sont propriétaires. L'exécution de l'ouvrage était prévue en deux étapes: la première consistait en la construction de deux appartements; la seconde, dans l'adjonction d'une aile supplémentaire abritant un troisième appartement. Le coût total des travaux était estimé à 1'516'800 fr., les honoraires de l'architecte étant fixés à 130'000 fr. pour la première étape et à 40'000 fr. pour la seconde. Le contrat prévoyait l'application de la norme 102 de la Société suisse des ingénieurs et des architectes (SIA).

Le 11 novembre 1986, l'architecte B.________, agissant pour le compte des défendeurs, a adjugé à C.________ (codemandeur) les travaux d'installations sanitaires et de chauffage pour un montant de 58'915 fr. Le contrat d'adjudication prévoyait l'application des normes SIA.

L'ouvrage conçu et exécuté par les demandeurs s'est révélé en partie défectueux. Les défendeurs, qui l'ont reçu le 2 octobre 1987, ont signalé les défauts constatés par eux dans les circonstances et selon les modalités qui seront précisées plus loin.

Par lettre recommandée du 3 mars 1988, B.________ a présenté aux défendeurs le décompte des travaux de la première étape. Invoquant les "grandes difficultés" rencontrées dans l'exécution de son mandat, l'architecte a, en outre, répudié celui-ci et renoncé à poursuivre l'exécution de la seconde étape. Le même jour, il a soumis aux défendeurs une note d'honoraires de 132'852 fr. 50 pour la première étape, leur réclamant le paiement de 11'350 fr. après imputation des acomptes versés, par 121'502 fr. 50. Pour ses prestations déjà effectuées au titre de la seconde étape, le demandeur a arrêté ses honoraires à 13'600 fr. Toujours à la même date, il a encore adressé aux défendeurs une note de frais faisant apparaître un solde de 979 fr. 70 en sa faveur.

Un permis d'habiter a été délivré aux défendeurs le 7 mars 1988. Après leur installation, ceux-ci se sont plaints d'une insuffisance de l'installation de chauffage. Les locataires du second appartement, occupé depuis le 1er novembre 1988, ont également formulé des doléances à ce propos.

Le 17 mars 1989, C.________ a adressé aux défendeurs sa facture, d'un montant de 79'116 fr.80, leur réclamant le paiement d'un solde de 26'116 fr. 80, compte tenu des 53'000 fr. d'acomptes versés. Par lettre recommandée du 27 juin 1989, il les a ensuite mis en demeure de lui régler ce solde jusqu'au 7 juillet 1989, avant de faire notifier, à cette dernière date, un commandement de payer la somme de 26'116 fr. 80, plus intérêts à 5% dès le 17 juin 1989, à sieur A.________ qui y a fait opposition totale.

B.

B.a Le 25 octobre 1989, B.________ a ouvert action contre les défendeurs en vue d'obtenir le paiement de 25'929 fr. 70 avec intérêts à 5% dès le 3 avril 1988.

Le 6 novembre 1989, C.________ a assigné les défendeurs, à titre de débiteurs solidaires, en paiement de 26'116 fr. 80 avec intérêts à 5% dès le 27 juin 1989. Il a requis, en sus, la levée définitive de l'opposition au commandement de payer précité.

Les deux causes ont été jointes par décision du 27 février 1990.

Dans leur réponse du 30 mars 1990, les défendeurs ont conclu à libération. Reconventionnellement, ils ont conclu à ce que les demandeurs soient condamnés, solidairement ou chacun dans la proportion que justice dirait, à leur payer la somme de 50'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 30 mars 1990.

Au terme de leur réplique du 25 juin 1991, les demandeurs ont conclu au rejet de la demande reconventionnelle.

Par duplique complémentaire après réforme du 30 octobre 1998, les défendeurs ont augmenté leurs conclusions pour réclamer aux demandeurs le paiement des sommes suivantes: 390'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 30 mars 1990, 200'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 11 octobre 1990 et 176'500 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juillet 1992. Les demandeurs ont requis le rejet des conclusions augmentées dans leurs déterminations du 26 novembre 1998.

B.b En cours de procédure, les défendeurs ont produit une série de rapports d'expertises privées en vue d'établir l'existence des défauts constatés par eux ainsi que l'origine de ceux-ci.

Une expertise judiciaire a, en outre, été confiée à l'architecte D.________, qui a déposé son rapport, le 24 mai 1993, accompagné de deux rapports techniques dressés par un ingénieur (E.________) et par un technicien en chauffage (F.________). L'expert judiciaire a estimé les coûts totaux des réfections des défauts à 62'963 fr. 45. Selon lui, la part de responsabilité de l'architecte dans la survenance de ces défauts pouvait être fixée à 30'000 fr. et celle du chauffagiste à 13'000 fr., montant auquel il convenait d'ajouter 9'256 fr. 75 de moins-values.

Pendente lite, les défendeurs ont mis en oeuvre, à titre privé, l'architecte G.________, lequel a établi son propre rapport, en date du 29 août 1996, sans avoir eu en mains celui de l'expert judiciaire. Cet architecte a ensuite dirigé les travaux de remise en état de la villa, évaluant à 390'000 fr. les dépenses à consentir pour remédier aux défauts de l'immeuble.

L'expert judiciaire a déposé un rapport complémentaire le 27 novembre 1996. Il y évalue le montant total des coûts des réparations à 155'220 fr., sans compter les honoraires pour la surveillance du chantier (19'280 fr.). D.________ estime à 46'993 fr. et à 12'077 fr. la part de ce montant que B.________ et C.________ doivent prendre en charge, eu égard à leur responsabilité respective dans la livraison de l'ouvrage défectueux.

B.c Par jugement préjudiciel du 30 mai 2002, la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a constaté que les conclusions prises par les défendeurs dans leur duplique étaient prescrites dans la mesure où elles dépassaient la somme de 50'000 fr.

B.d Statuant le 11 octobre 2004, la Cour civile a condamné B.________ à payer aux défendeurs, créanciers solidaires, la somme de 46'330 fr., plus intérêts à 5% dès le 30 mars 1990, sous déduction du montant de 15'929 fr. 70, valeur au 29 octobre 1989. Elle a, par ailleurs, condamné solidairement les défendeurs à payer à C.________ la somme de 17'996 fr. 25, avec intérêts à 5% dès le 8 juillet 1989, et levé définitivement, dans cette mesure, l'opposition formée par sieur A.________ au commandement de payer qui lui avait été notifié.

Le jugement rendu par la cour cantonale repose, en substance, sur les motifs suivants:

Le demandeur B.________ et les défendeurs étaient liés par un contrat d'architecte global, tandis que les relations nouées par ceux-ci avec le demandeur C.________ relevaient du contrat d'entreprise. Le premier contrat se réfère à la norme SIA 102; le second dispose que "les normes SIA sont applicables". Les demandeurs ont certes allégué le contenu de ces normes, mais ils ne l'ont pas prouvé puisqu'ils n'ont pas produit les normes en question. Celles-ci ne sont pas un fait notoire, au sens de l'art. 4 al. 2 du Code de procédure civile vaudois (CPC vaud.). N'ayant pas été prouvées, elles ne sauraient être prises en considération. Dès lors, seules sont applicables, en l'espèce, les dispositions topiques du Code des obligations, en particulier celles relatives à l'avis des défauts. Que l'expert judiciaire se réfère parfois aux normes SIA n'y change rien et n'est du reste pas critiquable car on ne saurait lui reprocher de s'être fondé sur une règle communément considérée par les architectes comme faisant généralement...

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