Arrêt nº 6S.293/2005 de Cour de Droit Pénal, 24 février 2006

Date de Résolution24 février 2006
SourceCour de Droit Pénal

Tribunale federale

Tribunal federal

{T 0/2}

6S.293/2005 /fzc

Arrêt du 24 février 2006

Cour de cassation pénale

Composition

MM. les Juges Schneider, Président,

Wiprächtiger, Kolly, Zünd ainsi que Mme la Juge suppléante Brahier.

Greffière: Mme Kistler.

Parties

X.________,

recourant, représenté par Me Didier Bottge, avocat,

contre

Ministère public de la Confédération,

Taubenstrasse 16, 3003 Berne.

Objet

Établissement arbitraire des faits (art. 9 Cst.); blanchiment d'argent (art. 305 bis CP), diminution effective de l'actif au préjudice des créanciers

(art. 164 CP), faux dans les titres (art. 251 CP),

pourvoi en nullité contre l'arrêt du Tribunal pénal fédéral, Cour des affaires pénales, du 6 juin 2005.

Faits:

A.

Par arrêt du 6 juin 2005, la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral à Bellinzone a reconnu X.________, né en 1942, ambassadeur de Suisse, coupable de blanchiment d'argent par métier (art. 305bis ch. 1 et 2 let. c CP), de faux dans les titres répétés (art. 251 ch. 1 CP), d'abus de confiance répétés (art. 138 ch. 1 CP) et de diminutions d'actifs répétées (art. 164 ch. 1 CP). Elle l'a condamné à une peine de trois ans et six mois de réclusion, sous déduction de la détention préventive subie, et à une amende de 15'000 francs. Elle a en outre ordonné la confiscation de certains biens au détriment de tiers et statué sur diverses conclusions civiles prises à l'encontre de X.________.

Les faits retenus dans cet arrêt à la charge de X.________ sont en résumé les suivants:

A.a A cinq reprises entre août et décembre 2001, A.________, une Colombienne, qui était à la tête, avec B.________, d'un réseau de trafiquants de stupéfiants en Espagne, a remis à X.________, qui ne la connaissait pas et qui ignorait jusqu'à son nom, des sacs en plastique qui contenaient des liasses de coupures hollandaises, américaines ou britanniques, présentant des traces de cocaïne, pour un montant d'environ 2'400'000 francs. X.________ n'a procédé à aucune vérification de l'argent remis, n'a signé aucune quittance et n'a posé aucune question sur l'origine des fonds.

Trois fois, il a changé l'argent reçu en dollars et l'a placé sur un compte à son nom auprès de la banque luxembourgeoise D.________; par la suite, sur instructions de B.________, il a fait procéder à de nombreux transferts sur des comptes étrangers dont il ne connaissait pas les destinataires et dont certains étaient impliqués dans des trafics de stupéfiants. Une quatrième fois, il a procédé de même par l'intermédiaire d'un compte à son nom auprès de la Banque C.________, à Lausanne. Pour la cinquième opération, il a transporté les fonds en Suisse, puis au Mexique, où il les a remis à son ami Y.________, qui a accepté d'effectuer des transferts de même valeur par le débit d'un compte qu'il maîtrisait auprès de la Banque E.________ à Genève. Ces activités ont rapporté 134'166 francs à X.________.

Interpellé par les employés des banques luxembourgeoise et vaudoise sur l'origine des fonds, X.________ a expliqué que l'argent provenait de son activité de courtier en antiquités et en objets d'art, domaine dans lequel il était réputé être un amateur éclairé; il a ajouté être parfaitement au fait des problèmes de blanchiment d'argent pour avoir siégé dans une commission chargée de cette question. Afin d'accréditer sa version sur la provenance des fonds, il a établi ou fait établir des documents écrits qui ne correspondaient pas à la réalité et qu'il a remis aux banques.

A.b X.________ était réputé pour son habileté en bourse, motif pour lequel, dès septembre 1994, des proches et certaines connaissances lui avaient confié des avoirs, afin qu'il les investisse sur les marchés boursiers. A la fin 1998, à la suite de la baisse des marchés boursiers, X.________ avait perdu la totalité des fonds confiés et de ses fonds propres; il était surendetté. Postérieurement au 1er janvier 1999, cinq clients qu'il n'avait pas informés de sa situation financière obérée lui ont versé 870'000 francs supplémentaires à placer en bourse. X.________ n'a pas investi ces sommes en bourse, mais les a utilisées pour rembourser d'autres investisseurs ou payer des intérêts à sa clientèle, ainsi que pour des dépenses personnelles.

A.c Le 6 mai 1999 ou plus tard, X.________ a cédé à son épouse, sans contrepartie, 2'750 actions de la société F.________ AG. A cette époque, sa situation financière était gravement obérée, et il était dans l'incapacité de faire face à d'importantes dettes envers ses clients investisseurs.

Le 23 avril 2003, à une époque où sa situation d'endettement était irréversible, X.________ a fait don à son épouse d'un immeuble sis à G.________. La valeur de l'immeuble était supérieure au montant des dettes garanties par les gages le grevant.

B.

X.________ dépose un pourvoi en nullité devant la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral. Il conclut à l'annulation partielle du jugement de première instance, dans la mesure où ce jugement le reconnaît coupable de blanchiment d'argent, de faux dans les titres et de diminutions d'actifs répétées, qu'il lui inflige une peine de réclusion de trois ans et six mois, qu'il ordonne la confiscation des biens appartenant à son épouse, qu'il alloue à Z.________ le produit de la réalisation de valeurs patrimoniales confisquées auprès de son épouse à concurrence de 400'000 francs et qu'il le condamne aux frais et au versement de dépens à Z.________ et Y.________. Il a en outre requis le bénéfice de l'assistance judiciaire et l'effet suspensif.

Le Ministère public de la Confédération a été invité à déposer ses observations éventuelles, en particulier sur le grief relatif aux infractions de faux dans les titres. Il a conclu au rejet du pourvoi dans la mesure où celui-ci était recevable et a déposé une réponse dans laquelle il se prononce non seulement sur le grief précité, mais sur tous les griefs soulevés. Ce mémoire a été communiqué au recourant afin qu'il puisse se déterminer, ce qu'il a fait après avoir obtenu une prolongation de délai.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

  1. La Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral, à Bellinzone, est le tribunal pénal de première instance dans les causes soumises à la juridiction fédérale (art. 191a al. 1 Cst.; art. 1 al. 1 de la loi fédérale du 4 octobre 2002 sur le Tribunal pénal fédéral, LTPF; RS 173.71). Ses jugements peuvent faire l'objet d'un pourvoi en nullité à la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral (art. 1 al. 2 et art. 33 al. 3 let. b LTPF). Les art. 268 ss PPF sont applicables par analogie, à l'exception de l'art. 269 al. 2 PPF (art. 33 al. 3 let. b LTPF).

    Le recourant a qualité pour recourir en tant qu'accusé (art. 270 let. a PPF). Le délai de recours de trente jours (art. 272 al. 1 PPF) a été respecté.

    La Cour de cassation ne peut pas aller au-delà des conclusions du recourant (art. 277bis al. 1 PPF). Le prononcé de culpabilité pour abus de confiance (ch. II/1.3 du jugement attaqué), la condamnation à verser 30'000 francs à H.________ (ch. II/6.1) et la condamnation à rembourser à la Confédération les cinq sixièmes de l'indemnité du défenseur d'office, fixée à 110'676 francs (ch. II/8), sont dès lors acquis, le recourant n'ayant pas fait figurer ces points du prononcé parmi ceux dont il demande la mise à néant.

  2. Dans un premier moyen, le recourant se plaint d'une violation de l'art. 9 Cst. lors de l'établissement des faits. Selon cette disposition constitutionnelle, toute personne a le droit d'être traitée sans arbitraire par les organes de l'État.

    2.1 Dans un pourvoi en nullité dirigé contre une décision cantonale, il ne peut pas être soulevé de grief d'ordre constitutionnel. Cela découle de l'art. 269 al. 2 PPF qui réserve pour ce cas le recours de droit public (ATF 120 Ia 31 consid. 2e p. 38).

    L'art. 33 al. 3 let. b LTPF prévoit cependant que l'art. 269 al. 2 PPF ne s'applique pas au pourvoi contre un jugement rendu par la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral à Bellinzone. Comme le recours de droit public n'est pas ouvert contre une décision rendue par une autorité fédérale (art. 84 ss OJ), cette règle ne peut signifier qu'une chose, à savoir que des griefs d'ordre constitutionnel peuvent être soulevés dans le cadre du pourvoi en nullité contre un jugement de cette autorité. De la sorte, le législateur a anticipé sur le futur recours unifié (cf. art. 95 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral, LTF, FF 2005 3829; message, FF 2001 4132).

    Le recourant est donc...

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