Arrêt nº 2A.215/2003 de IIe Cour de Droit Public, 20 janvier 2005

Date de Résolution20 janvier 2005
SourceIIe Cour de Droit Public

Tribunale federale

Tribunal federal

{T 0/2}

2A.215/2003 /fzc

Arrêt du 20 janvier 2005

IIe Cour de droit public

Composition

MM. et Mme les Juges Merkli, Président, Wurzburger, Müller, Yersin et Camenzind, Juge suppléant.

Greffier: M. Vianin

Parties

Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA),

3003 Berne,

recourante,

contre

V.________ (anc. A.________),

intimée,

représentée par Ernst & Young SA,

Commission fédérale de recours en matière de contributions, avenue Tissot 8, 1006 Lausanne.

Objet

taxe sur la valeur ajoutée; représentation,

recours de droit administratif contre la décision de la Commission fédérale de recours en matière de contributions du 26 mars 2003.

Faits:

A.

V.________ (anciennement A.________; ci-après: la Société ou l'intimée), société anonyme de siège à Genève, est immatriculée dans le registre des assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après: TVA) depuis le 1er janvier 1995. Elle fournit à des sociétés suisses propriétaires de navires de haute mer (armateurs) des prestations de gérance (affrètement, chargement, déchargement, surveillance de bateaux, etc.) et de gestion du personnel de bord, dans le cadre de contrats de gestion des équipages. Le 8 juin 1993, la Société a conclu un tel contrat, intitulé «crewing agreement» (ci-après: le contrat de gestion de l'équipage), avec la société B.________ SA, à Fribourg, qui était représentée par la société C.________ SA, à Lausanne. Aux termes de cette convention soumise au droit anglais, la Société s'engageait à fournir des prestations de gestion de l'équipage du bâtiment «D.________», battant pavillon des Bahamas et appartenant à B.________ SA, en agissant en qualité d'agent de celle-ci («as agents for and on behalf of the Owners»). Ces prestations consistaient à engager et gérer le personnel d'équipage (notamment engagement, transport jusqu'au navire et rapatriement, planification des besoins en personnel, paiement des salaires et des éventuelles pensions, contrôle des performances, établissement d'un règlement, prise de mesures disciplinaires et plus généralement gestion de toutes les affaires relatives à l'équipage) et à effectuer la planification financière (établissement d'un budget annuel, calcul des liquidités nécessaires pour le mois suivant, contrôle mensuel du respect du budget, rapport trimestriel sur le respect du budget). Les armateurs versaient d'avance pour le mois suivant les montants nécessaires à la gestion du navire, selon l'estimation faite par la Société. Les fonds étaient portés au crédit des armateurs sur un compte bancaire séparé, géré de manière fiduciaire par la Société. Il était exclu que celle-ci effectue l'avance des fonds nécessaires à la gestion du navire. Pour ses prestations, la Société était rémunérée à raison de xxx US $ par mois. Elle avait la faculté de sous-traiter celles-ci à des sociétés liées à elle. Lorsqu'elle faisait usage de cette faculté, elle continuait toutefois de répondre seule de la bonne exécution de ses obligations à l'égard des armateurs. Par ailleurs, la Société n'assumait une responsabilité vis-à-vis des armateurs qu'en cas de négligence, de négligence grave ou de faute intentionnelle («wilful default») de ses organes ou de ses employés, agents ou sous-traitants. Dans ces cas, elle ne pouvait en principe être appelée à répondre que jusqu'à concurrence d'un montant équivalant à dix fois ses honoraires mensuels, soit, en l'état, à xxx US $; une responsabilité plus étendue ne pouvait exister que si les organes de la Société commettaient personnellement un dol ou se comportaient de manière téméraire. La Société assumait la même responsabilité à l'égard des tiers, les armateurs s'engageant à l'indemniser dans la mesure nécessaire si elle était amenée au plan externe à répondre au-delà.

La Société a conclu des contrats semblables pour la gestion des équipages d'autres bateaux (notamment le «E.________», armé également par B.________ SA, ainsi que le «F.________», armé par la société G.________ AG, à Coire).

Le 1er août 1994, la Société a conclu un contrat de services de gestion d'équipages («crewing services»; ci-après: le contrat sur l'engagement d'équipages) avec H.________ Ltd, à Odessa, devenue entre-temps I.________ Ltd. Selon cette convention, également soumise au droit anglais, les prestations de cette dernière société consistaient à engager les membres d'équipage en agissant au nom et pour le compte des armateurs («for and on behalf of the Owners»), à organiser leur transport jusqu'aux navires, à fournir les uniformes et à effectuer sur demande d'autres prestations en relation avec la gestion des équipages («any other services required in connection with crewing Ships»). Pour ses propres prestations, I.________ Ltd était rémunérée par la Société à raison de xxx US $ par navire et par mois.

En exécution de ce contrat, I.________ Ltd a recruté des membres d'équipages à Odessa, notamment pour le navire «D.________», en agissant au nom et pour le compte («as agents to and for and on behalf of») de B.________ SA.

B.

Le 15 janvier 1999, l'Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après: l'Administration fédérale ou la recourante) a effectué auprès de la Société un contrôle fiscal portant sur la période allant du 1er janvier 1995 au 30 septembre 1998 (du 1er trimestre 1995 au 3ème trimestre 1998). A la suite de ce contrôle, le décompte complémentaire no 127114 d'un montant de xxx fr. a été établi, montant correspondant à des reprises sur des prestations de management (management fees ou crewing fees), des frais de télécommunications refacturés aux clients et des prestations de mise à disposition de main d'oeuvre fournies à des sociétés suisses. Les management fees ou crewing fees (xxx fr. au total, soit un montant de TVA de xxx fr.) représentaient les montants que la Société avait facturés à B.________ SA (navires «D.________» et «E.________»), à G.________ AG («F.________») ainsi qu'aux sociétés J.________ SA («K.________»), L.________ SA («M.________»), N.________ («O.________»), P.________ - vraisemblablement P.________ SA - («Q.________» et «R.________») et S.________ SA, toutes à Fribourg, pour la gestion des équipages des navires précités ou pour «consultation technique». Quant aux prestations de mise à disposition de main d'oeuvre, la reprise portait sur les «frais de personnel de bord» pour les navires «E.________», «D.________» et «F.________», que la Société avait «facturés» à B.________ SA et G.________ AG durant la période contrôlée. Ces frais se montaient au total à xxx fr., d'où résultait un montant de TVA à acquitter de xxx fr. L'Administration fédérale a considéré que la Société mettait le personnel d'équipage à la disposition des armateurs, notamment eu égard au fait qu'elle établissait les fiches de salaire en son propre nom et que les contrats d'engagement des marins renvoyaient à la convention collective («collective fleet agreement») du groupe A.________. S'agissant des équipages des navires appartenant au groupe «P.________», elle a estimé au contraire que le rôle de la Société se limitait à gérer le personnel, du moment que le groupe en question engageait et payait les marins et assurait lui-même les marins suisses (courrier du 15 janvier 1999 de l'Administration fédérale à la Société, p. 3).

Le décompte complémentaire a été confirmé par décision du 21 février 2000. Dans sa réclamation du 20 mars 2000, la Société a contesté le bien-fondé de la reprise portant sur les prestations de mise à disposition de main d'oeuvre - c'est-à-dire sur l'ensemble des frais de personnel facturés aux armateurs -, tout en admettant les reprises sur les prestations de management - soit sur la rémunération de ses services - et sur les frais de télécommunications. La réclamation a été rejetée par décision du 29 janvier 2001. La Société a interjeté recours contre cette décision devant la Commission fédérale de recours en matière de contributions (ci-après: la Commission de recours).

Par décision du 19 juin 2001, la Commission de recours a déclaré le recours irrecevable pour cause de versement tardif de l'avance de frais. Ce prononcé a été annulé par arrêt du Tribunal de céans du 19 septembre 2001 et le dossier renvoyé à la Commission de recours pour qu'elle statue sur le fond du litige.

Le 26 mars 2003, la Commission de recours a admis le recours. Elle a considéré que la Société était représentante...

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