Arrêt nº 6S.394/2003 de Cour de Droit Pénal, 18 mars 2004

Date de Résolution18 mars 2004
SourceCour de Droit Pénal

Tribunale federale

Tribunal federal

{T 0/2}

6S.394/2003 /rod

Séance du 18 mars 2004

Cour de cassation pénale

Composition

MM. et Mme les Juges Schneider, Président, Wiprächtiger, Kolly, Karlen et Brahier Franchetti,

Juge suppléante.

Greffière: Mme Angéloz.

Parties

A.________, actuellement détenu ....

recourant, représenté par Me Yanis Callandret, avocat,

contre

Ministère public du canton de Neuchâtel, rue du Pommier 3, case postale 2672, 2001 Neuchâtel 1.

Objet

Mise en danger de la vie d'autrui (art. 129 CP),

pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel

du 1er octobre 2003.

Faits:

A.

Par jugement du 3 septembre 2002, la Cour d'assises du canton de Neuchâtel a condamné A.________, ressortissant marocain né en 1971, pour meurtre (art. 111 CP), assassinat (art. 112 CP), mise en danger de la vie d'autrui (art. 129 CP), recel par métier (art. 160 ch. 1 et 2 CP), infractions aux art. 19 ch. 1 et 19a LStup et à l'art. 23 LSEE, à la réclusion à vie, prononçant en outre son expulsion pour 15 ans, sans sursis.

Statuant sur le pourvoi en cassation interjeté par le condamné contre ce jugement, la Cour de cassation pénale du Tribunal neuchâtelois l'a écarté par arrêt du 1er octobre 2003.

B.

S'agissant des faits pertinents pour le jugement de la présente cause, cet arrêt retient, en résumé, ce qui suit.

B.a Dans la nuit du 29 au 30 mars 2001, A.________ s'est rendu au domicile de B.________, avec laquelle il entretenait une relation intime intermittente qui se dégradait depuis le début de l'année 2000. Il est arrivé sur les lieux suite à un téléphone houleux avec celle-ci, probablement pour la convaincre de ne pas lui causer d'ennuis avec la police des étrangers. B.________ s'est d'emblée montrée agressive envers A.________. En colère, ce dernier s'est emparé d'un couteau à viande qu'il avait vu par hasard, avec lequel il a frappé B.________ à au moins dix reprises, notamment au thorax et dans le dos, la blessant ainsi mortellement.

B.b Peu auparavant, C.________ était intervenue brièvement dans la discussion, à la demande de A.________, qui l'avait appelée pour calmer son amie. Elle s'était toutefois rangée du côté de cette dernière, avant de quitter le salon, où elle est cependant revenue lorsque B.________ est tombée sur le sol. Ayant vu le corps, elle est repartie sans mot dire en direction de la chambre où se trouvaient les deux enfants D.________ et E.________. A.________, voulant éliminer un témoin gênant, a alors également frappé C.________ avec le couteau, lui assénant au moins vingt coups, notamment au thorax et dans le dos, et causant ainsi sa mort.

B.c Après avoir frappé mortellement les deux femmes, A.________ a quitté l'appartement, peu après 2 heures du matin, en fermant la porte à clef, alors qu'il savait que s'y trouvaient les deux enfants D.________ et E.________, âgés respectivement de 8 mois et 4 mois. Ceux-ci n'ont été découverts par la police que le samedi 31 mars 2001 vers 17 heures, soit environ 39 heures après les homicides, pendant lesquelles ils sont ainsi restés sans manger ni boire. Selon les rapports médicaux, ils présentaient une déshydratation modérée à leur arrivée à l'hôpital.

Il a été retenu que les deux enfants avaient été découverts par la police suite à un appel téléphonique de la concierge de l'immeuble, alertée par des amies de B.________, qui s'étaient inquiétées de son sort, et qu'ils auraient fort bien pu n'être retrouvés que de nombreuses heures, voire plusieurs jours, plus tard. Il a également été retenu que A.________, en abandonnant les deux nourrissons livrés à eux-mêmes, de surcroît, après avoir fermé à clef la porte de l'appartement, ne pouvait être que conscient du risque qu'il leur faisait courir, et que, contrairement à ce qu'il alléguait, il n'avait rien entrepris pour sauvegarder leur vie, mais les avait abandonnés au péril résultant pour eux de la mise à mort de leurs mères.

B.d Les faits décrits sous lettre B.a ci-dessus ont été considérés comme constitutifs de meurtre au sens de l'art. 111 CP et ceux décrits sous let. B.b comme constitutifs d'assassinat au sens de l'art. 112 CP. Quant aux faits décrits sous lettre B.c, ils ont été qualifiés de mise en danger de la vie d'autrui au sens de l'art. 129 CP.

C.

A.________ se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Contestant sa condamnation pour mise en danger de la vie d'autrui, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué, en sollicitant l'assistance judiciaire.

L'autorité cantonale relève que l'argumentation du recourant selon laquelle une personne peut rester de plusieurs jours à plusieurs semaines sans boire est valable pour des adultes, de sorte qu'elle est sans pertinence pour des enfants de huit et quatre mois. Pour le surplus, elle ne formule pas d'observations.

Le Ministère public a renoncé à se déterminer.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

  1. Saisie d'un pourvoi en nullité, la Cour de cassation contrôle l'application du droit fédéral (art. 269 PPF) sur la base d'un état de fait définitivement arrêté par l'autorité cantonale (cf. art. 277bis et 273 al. 1 let. b PPF). Elle ne peut donc pas revoir les faits retenus dans la décision attaquée ni la manière dont ils ont été établis, de sorte que ces points, sous peine d'irrecevabilité, ne peuvent être remis en cause dans le pourvoi (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66/67; 124 IV 53 consid. 1 p. 55, 81 consid. 2a p. 83 et les arrêts cités).

  2. Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 129 CP. Il fait valoir qu'on ne peut lui reprocher d'avoir créé un danger, mais seulement d'avoir omis de remédier à celui qui pouvait survenir, de sorte que son comportement pourrait tout au plus tomber sous le coup de l'art. 128 al. 1 CP. Il soutient en outre qu'on ne peut parler d'un danger de mort imminent, au vu du laps de temps pendant lequel les enfants sont restés dans l'appartement et, surtout, des constatations médicales selon lesquelles ils présentaient une déshydratation modérée. Il conteste au demeurant avoir été conscient de mettre la vie des enfants en danger de mort imminent et avoir voulu le faire. Enfin, alléguant avoir entrepris des démarches pour que les enfants puissent être découverts, il conteste avoir agi sans scrupules.

    2.1 L'art. 129 CP réprime le comportement de celui qui, sans scrupules, aura mis autrui en danger de mort imminent.

    Sur le plan objectif, cette infraction suppose que l'auteur ait causé un danger de mort imminent pour autrui...

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