Arrêt nº 4C.317/2002 de Ire Cour de Droit Civil, 20 février 2004

Date de Résolution20 février 2004
SourceIre Cour de Droit Civil

Tribunale federale

Tribunal federal

{T 0/2}

4C.317/2002 /ech

Arrêt du 20 février 2004

Ire Cour civile

Composition

MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Walter, Klett, Nyffeler et Favre.

Greffière: Mme de Montmollin

Parties

La Fondation X.________,

demanderesse et recourante, représentée par

Me Philippe Pont,

contre

La Masse en faillite de feu A.________,

défenderesse et intimée, représentée par Me Hildebrand de Riedmatten.

Objet

Acte illicite; responsabilité civile pour délit de chasse.

Recours en réforme contre le jugement du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour civile II, du 10 septembre 2002.

Faits:

A.

Le 4 novembre 1997, au cours d'une chasse, B.________ a abattu le gypaète barbu Republic V sur un alpage situé au-dessus de Montana.

Reconnu coupable de violation de l'art. 17 de la loi fédérale sur la chasse et la protection des mammifères et oiseaux sauvages du 20 juin 1986 (ci-après: LChP), B.________ a été condamné, par jugement du 17 février 1999, à 10 jours d'emprisonnement avec sursis pendant deux ans; son autorisation de chasse lui a été retirée pour un an. L'Etat du Valais s'était constitué partie civile dans la procédure pénale, par son service de la chasse. A la suite d'une transaction en application de laquelle B.________ a versé 20'000 fr. à titre de "dédommagement pour le gypaète barbu", l'Etat du Valais s'est désisté de ses conclusions civiles.

B.

Le gypaète barbu a été massivement exterminé au cours du 19e siècle, disparaissant officiellement du Valais à la fin février 1886. Dans les années 1970, le rapace a été réintroduit dans les Alpes. Le premier indice de sa présence en Valais remonte au mois de juin 1987. De 1987 à 1995, 14 gypaètes ont été identifiés de façon certaine dans le canton, dont Republic V, âgé de cinq ans au moment de sa mort. Celui-ci avait été observé à tout le moins pendant deux ans. Son territoire se situait entre C.________ et D.________.

La Fondation X.________ (ci-après: la Fondation) a été constituée en 1991. Cette institution, dont le siège est aux Pays-Bas, chapeaute un projet international entrepris en 1978, soutenu par des fonds publics et privés. Son but est la reconstitution d'une population sauvage de ces oiseaux dans les Alpes. Elle coordonne les échanges entre une trentaine de jardins zoologiques qui participent à l'élevage dans le monde entier. Chaque année, elle choisit, parmi les oiseaux du réseau d'élevage, ceux qui seront réintroduits. Elle supervise le lâcher de jeunes oiseaux dans quatre sites de réintroduction créés dans l'ensemble du massif alpin. Les oiseaux sont munis, juste avant le lâcher, de marquage alaire individuel ainsi que de deux bagues colorées. Ils sont régulièrement suivis dans leurs déplacements par un réseau d'observateurs bénévoles mis en place sur l'ensemble de l'arc alpin. En 2002, plus de 100 gypaètes barbus avaient été réintroduits dans la nature.

Republic V, né le 14 février 1993, provenait de la station d'élevage en Autriche, qui est supportée financièrement par une société zoologique en Allemagne. Une banque américaine avait parrainé l'opération à hauteur de 20'000 fr.

C.

Le 12 mai 2000, la Fondation a assigné B.________ en paiement de 118'000 fr. avec intérêts à 5 % dès le 4 novembre 1997 à titre d'indemnisation des frais investis pour Republic V. Par jugement du 10 septembre 2002, la Cour civile II du Tribunal cantonal valaisan a rejeté la demande. La cour a estimé, comme avant elle les autorités pénales, que la Fondation n'avait pas la qualité pour agir en paiement de dommages-intérêts contre le défendeur. Au demeurant, le préjudice invoqué ne constituait pas un dommage juridiquement reconnu en droit suisse; de surcroît, le préjudice n'était établi ni dans son existence, ni dans son ampleur.

D.

La Fondation recourt en réforme contre l'arrêt du 10 septembre 2002, renouvelant devant le Tribunal fédéral ses conclusions de première instance.

Le défendeur est décédé durant le procès. Ses héritiers ont répudié la succession qui a été liquidée par l'Office des faillites de E.________. Par courrier du 4 décembre 2003, ce dernier a avisé le Tribunal fédéral que la masse en faillite avait décidé de reprendre le procès. En temps utile, cette dernière a déposé une réponse pour inviter le Tribunal fédéral à rejeter le recours dans la mesure de sa recevabilité.

La cour cantonale n'a pas déposé d'observations.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

  1. Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique - n'étant pas lié par celui de la cour cantonale ou par les motifs invoqués par les parties (art. 63 al. 1 et 3 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c) - sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il n'y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art 63 al. 2 OJ) ou qu'il ne faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c), toutes exceptions que le recourant doit soulever expressément s'il entend s'en prévaloir. En dehors de ces cas exceptionnels, le recourant...

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