Arrêt nº 1A.231/2003 de Ire Cour de Droit Civil, 6 février 2004

Date de Résolution 6 février 2004
SourceIre Cour de Droit Civil

Tribunale federale

Tribunal federal

{T 0/2}

1A.231/2003 /col

Arrêt du 6 février 2004

Ire Cour de droit public

Composition

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal fédéral, Reeb et Féraud.

Greffier: M. Zimmermann.

Parties

  1. A.________,

  2. la société B.________,

  3. la société C.________,

  4. la société D.________,

  5. la société E.________,

  6. la société F.________,

  7. la société G.________,

    recourants,

    tous représentés par Me Jean-Jacques Martin, avocat,

    contre

    Juge d'instruction du canton de Genève,

    case postale 3344, 1211 Genève 3,

    Chambre d'accusation du canton de Genève,

    place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108,

    1211 Genève 3.

    Objet

    entraide judiciaire internationale en matière pénale

    à la France,

    recours de droit administratif contre l'ordonnance

    de la Chambre d'accusation du canton de Genève

    du 10 septembre 2003.

    Faits:

    A.

    Le 28 décembre 2000, le Procureur général de la Cour d'appel de Paris a adressé au Procureur général du canton de Genève une demande d'entraide judiciaire fondée sur la Convention européenne d'entraide judiciaire conclue le 20 avril 1959 et entrée en vigueur le 20 mars 1967 pour la Suisse et le 21 août 1967 pour la France (CEEJ; RS 0.351.1), ainsi que sur l'accord bilatéral complétant cette Convention (ci-après: l'Accord complémentaire; RS 0.351.934.92), conclu le 28 octobre 1996, entré en vigueur le 1er mai 2000. La demande, datée du 22 décembre 2000, était présentée pour les besoins de la procédure conduite par les Juges d'instruction Philippe Courroye et Isabelle Prevost-Desprez à l'encontre notamment des ressortissants français H.________ et I.________, poursuivis pour blanchiment, fraude fiscale, recel, trafic d'influence et commerce illicite d'armes et complicité dans la commission de ces délits. Selon l'exposé des faits joint à la demande, H.________ contrôlerait avec I.________ les sociétés J.________ et K.________, actives dans le commerce d'armes provenant d'Europe de l'Est et destinées à l'Afrique, notamment l'Angola, le Cameroun et le Congo. Ils sont en outre soupçonnés d'avoir détourné, à des fins personnelles, des montants de 78'400'000 USD et 68'700'000 USD au détriment de J.________ et de K.________. Ces faits constitueraient des abus de biens sociaux et des abus de confiance. Une partie des sommes détournées aurait servi au financement de campagnes électorales, constituant des abus de biens sociaux, d'abus de confiance, de trafic d'influence et de recel. J.________ et K.________ n'auraient pas produit de déclaration fiscale depuis 1995, alors qu'elles avaient exercé une activité lucrative importante. Enfin, H.________ et I.________ auraient, sous le couvert de J.________, de K.________ et d'autres sociétés, blanchi le produit des délits commis. La demande tendait à la remise de la documentation relative à des comptes bancaires ouverts à Genève.

    Le 26 décembre 2000, le Juge d'instruction du canton de Genève a ouvert la procédure d'entraide, désignée sous la rubrique CP/414/ 2000, en rendant une décision d'entrée en matière au sens de l'art. 80e de la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, du 20 mars 1981 (EIMP; RS 351.1), valant également comme ordonnance de perquisition et de saisie au sens des art. 178ss CPP gen.

    En décembre 2000 et en janvier 2001, l'Office fédéral de la justice (ci-après: l'Office fédéral) a transmis au Procureur général du canton de Genève des communications au sens de l'art. 10 LBA, concernant I.________ et K.________.

    Sur la base de ces informations, le Procureur général a ouvert une information pénale confiée au Juge d'instruction chargé de la procédure CP/414/2000. Dans le cadre de cette procédure, désignée sous la rubrique P/16972/2000, le Juge d'instruction a ordonné la saisie de plusieurs comptes bancaires.

    Le Juge Courroye a complété la demande le 17 janvier 2001, en demandant l'extension des mesures requises aux comptes détenus ou contrôlés par les prévenus, ainsi que par différents tiers, dont des personnes morales.

    Plusieurs décisions et arrêts ont été rendus à ce propos.

    B.

    Le 21 mai 2001, les Juges Courroye et Prevost-Desprez ont transmis au Juge d'instruction une demande complémentaire. Les développements de l'enquête avaient permis d'établir que I.________ était intervenu, entre 1993 et 1995, auprès de la société L.________, société d'exportation de matériel militaire dépendant du Ministère français de l'intérieur, pour obtenir des autorisations portant sur des ventes d'armes à l'Angola. K.________ aurait financé l'association M.________. Les locaux loués par celle-ci avaient abrité un club politique dirigé par N.________, ancien Ministre de l'Intérieur. K.________ avait également financé des voyages en avion au profit de N.________, ainsi que de O.________, ancien Préfet du département du Var et ancien conseiller auprès du Ministère de l'Intérieur. K.________ aurait également viré des montants importants sur des comptes bancaires ouverts au nom de O.________ et de membres de sa famille. A raison de ces faits, N.________ et O.________ étaient poursuivis du fait de recel d'abus de confiance et d'abus de biens sociaux. Il était reproché en outre à N.________ et O.________ d'être intervenus pour que H.________ soit décoré de la croix de chevalier de l'ordre national du mérite. Enfin, K.________ aurait versé des montants importants en faveur du parti politique fondé par N.________, en vue du financement de la campagne des élections au Parlement européen de 1999. O.________ a été élu député au Parlement européen pour le compte de cette formation. Ces faits laissaient supposer un trafic d'influence. La demande tendait à la remise de documents bancaires.

    Plusieurs décisions et arrêts ont été rendus à ce propos.

    C.

    Le 19 mars 2002, le Juge Courroye a présenté une nouvelle demande, pour les besoins de la procédure ouverte en France contre les dénommés P.________, Q.________, R.________, S.________, T.________ et U.________, poursuivis notamment de trafic d'influence, de blanchiment d'argent et d'abus de biens sociaux. Selon l'exposé des faits joint à la demande, le dénommé A.________ aurait remis à M.________, par l'entremise de la banque V.________, des montants de l'ordre de 31 millions FRF et 100'000 USD, entre 1995 et 2001. Ces fonds provenaient de l'agence de la banque V.________ à Genève, pour être remis à S.________, ainsi qu'à O.________ et à son épouse. De même, des fonds provenant de la banque W.________, de la banque X.________, de la banque Y.________ et de la banque Z.________ à Genève, auraient été remis à M.________ et O.________, par l'entremise d'un compte ouvert auprès de la banque W.________. A.________ et certains de ses familiers étaient soupçonnés d'avoir bénéficié d'interventions concernant leur situation administrative, constitutives de trafic d'influence. En outre, les autorités françaises avaient ouvert une procédure des faits d'abus de biens sociaux et de recel, en relation avec un contrat de vente d'armes passé entre la société AA.________ et la société E.________ (devenue dans l'intervalle LL.________), toutes deux dominées par A.________. Des commissions avaient été versées sur des comptes ouverts auprès de la banque V.________ à Genève au nom d'une société D.________, pour un montant de 16 millions FRF, et au nom d'une société F.________, pour un montant de 12,6 millions FRF. Une société C.________ pouvait également être impliquée dans ces opérations. La demande tendait à la recherche des comptes bancaires utilisés, à leur blocage et à la remise de la documentation y relative, ainsi qu'à l'audition de leurs gérants.

    A la demande sont joints une copie des dispositions pénales applicables, ainsi qu'une lettre adressée le 13 janvier 2002 au Juge Prevost-Desprez par A.________.

    Le 5 mai 2002, le Juge d'instruction est entré en matière.

    Le 27 juin 2002, le Juge Prevost-Desprez a transmis au Juge d'instruction la copie d'un mandat d'arrêt international décerné le 21 juin 2002 à l'encontre de A.________, poursuivi pour blanchiment de capitaux et trafic d'influence, d'abus de biens sociaux commis au détriment de la société BB.________ et complicité d'abus de biens sociaux commis au détriment de E.________. L'exposé des faits joint à ce mandat reprenait celui joint à la demande du 19 mars 2002, avec un certain nombre de précisions. P.________ avait reconnu avoir remis à S.________ et O.________ des montants en espèces, ce que Q.________avait également confirmé. Une dénommée CC.________ avait été mise en examen du chef d'abus de biens sociaux au préjudice des sociétés LL.________ et E.________ pour avoir fait verser des commissions injustifiées notamment à D.________ et F.________. A.________ était poursuivi pour abus de biens sociaux commis au détriment de la société BB.________ pour avoir occupé un logement sans en acquitter le loyer. Il aurait fait louer gratuitement à M.________ des locaux propriété de E.________.

    Le 3 janvier 2003, le Juge d'instruction a rendu une décision de clôture partielle de la procédure d'entraide, portant sur la transmission de la documentation relative aux comptes suivants:

    1) n°aaaaa ouvert le 25 avril 1995 auprès de la banque Y.________ à Genève, dont la société B.________ est la titulaire et le frère de A.________ l'ayant droit;

    2) n°bbbbb ouvert le 26 septembre 1994 auprès de la banque V.________ à Genève, dont la société C.________ est la titulaire, les frères A.________ les ayants droit;

    3) n°ccccc ouvert ouvert le 7 août 1991 auprès de la banque DD.________ à Genève, puis transféré à la banque V.________ le 26 septembre 1994, dont la société D.________ est la titulaire, les frères A.________ les ayants droit;

    4) n°ddddd ouvert le 5 août 1991 auprès de...

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