Arrêt nº 1A.214/2003 de Ire Cour de Droit Civil, 5 décembre 2003

Date de Résolution 5 décembre 2003
SourceIre Cour de Droit Civil

Tribunale federale

Tribunal federal

{T 0/2}

1A.214/2003 /col

Arrêt du 5 décembre 2003

Ire Cour de droit public

Composition

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour

et Président du Tribunal fédéral, Reeb et Féraud.

Greffier: M. Zimmermann.

Parties

R.________,

I.________,

H.________,

P.________,

recourantes,

toutes représentées par Me Bruno de Preux, avocat,

contre

Office fédéral de la justice, Division des affaires internationales, Section de l'entraide judiciaire internationale, Bundesrain 20, 3003 Berne.

Objet

entraide judiciaire internationale en matière pénale

à l'Allemagne,

recours de droit administratif contre les décisions

de l'Office fédéral de la justice des 20 août 2002 et

27 août 2003.

Faits:

A.

La République fédérale du Nigeria (ci-après: la République fédérale) a demandé l'entraide judiciaire à la Suisse pour les besoins de l'enquête ouverte au Nigeria au sujet des détournements de fonds publics dont se seraient rendus coupables feu Sani Abacha, chef de l'Etat de novembre 1993 à novembre 1998, ainsi que ses proches.

Parallèlement, le Procureur général du canton de Genève a, dans le même complexe de faits, ordonné l'ouverture d'une information pénale des chefs d'organisation criminelle (art. 260ter CP) et de blanchiment d'argent (art. 305bis CP). Dans le cadre de cette procédure (désignée sous la rubrique P/12983/99), le Juge d'instruction a, le 14 août 2000, adressé une demande d'entraide au Grand-Duché du Luxembourg, tendant à la remise de la documentation relative à des comptes bancaires ouverts auprès de la banque W.________ au Luxembourg. A cette demande, complétée le 11 janvier 2001, étaient joints des extraits de la documentation relative au compte n°aaa (compte n°1) ouvert auprès de la banque V.________ à Genève, dont la société nigériane I.________ est la titulaire, ainsi qu'une pièce extraite de la documentation relative au compte n°xxx (compte n°2) ouvert auprès de la banque W.________ à Zurich, dont la société nigériane R.________ est la titulaire. En exécution de ces requêtes, les autorités luxembourgeoises ont fait parvenir au Juge d'instruction les pièces concernant les comptes suivants:

3) n°bbb, ouvert le 12 janvier 1998, dont la société H.________, domiciliée aux Iles Vierges britanniques, est la titulaire et les ressortissants nigérians A.________ et B.________ les ayants droit;

4) n°ccc, ouvert le 9 août 1996, dont la société P.________, domiciliée aux Iles Vierges britanniques, est la titulaire et les ressortissants nigérians A.________ et B.________ les ayants droit.

B.

Le 11 juillet 2002, le Procureur général ("Leitender Oberstaatsanwalt") de Bochum a adressé à l'Office fédéral de la justice (ci-après: l'Office fédéral) une demande d'entraide fondée sur la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (CEEJ; RS 0.351.1), entrée en vigueur le 1er janvier 1977 pour l'Allemagne et le 20 mars 1967 pour la Suisse, ainsi que sur l'accord bilatéral complétant cette Convention, entré en vigueur le 1er janvier 1977 (l'Accord complémentaire; RS 0.351.913.61). La demande était présentée pour les besoins de la procédure ouverte contre les ressortissants allemands M.________, L.________, E.________, U.________ et D.________, soupçonnés de complicité d'abus de confiance ("Beihilfe zur Untreue") au sens de l'art. 266 du Code pénal allemand (dStGB), en relation avec l'art. 27 de la même loi. Ces délits auraient été commis en relation avec des paiements effectués par la société F.________, en faveur de ressortissants nigérians. M.________ et L.________ faisaient partie de la direction de F.________, dont l'une des sociétés sous-traitante était dirigée par E.________. Le 17 octobre 1989, la société nigériane N.________, dont la République fédérale détient 70% du capital, avait conclu avec F.________ un contrat portant sur la construction d'une usine de fabrication de l'aluminium au Nigeria, pour un prix de 2,4 milliards DEM. Après son accession au pouvoir, Sani Abacha aurait exigé de profiter de la réalisation du projet. Entre le 17 novembre 1994 et le 9 juin 1998, F.________ aurait versé un montant total de 747'950'000 DEM à diverses sociétés et fondations contrôlées par Abacha et ses proches, sous le couvert de prestations fictives attestées par de fausses factures. Une partie de ces fonds aurait été virée sur le compte ouvert par R.________ auprès de W.________. Les autorités allemandes soupçonnent les prévenus d'avoir aidé Abacha et ses proches à commettre des abus de confiance au détriment de N.________ et de la République fédérale. La demande tendait à la remise de la documentation utile pour l'enquête que détiendrait le Juge d'instruction genevois, ainsi qu'à la consultation de son dossier par un membre du Parquet de Bochum.

Le 20 août 2002, l'Office fédéral a rendu une décision d'entrée en matière au sens de l'art. 80a de la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, du 20 mars 1981 (EIMP; RS 351.1). Il a chargé le Juge d'instruction de procéder au tri des pièces se trouvant en sa possession, qui pourraient être utiles à la procédure ouverte dans l'Etat requérant, en présence d'Ekkehart Carl, Procureur auprès du Parquet de Bochum. Cette décision a été notifiée au Juge d'instruction uniquement. Elle a été communiquée pour information au Procureur général de Bochum.

Le 21 août 2002, l'Office fédéral a requis le Procureur Carl de lui confirmer qu'il n'établirait pas de copie des documents triés, et qu'aucune utilisation n'en serait faite avant l'entrée en force d'une décision de clôture de la procédure d'entraide. Le 23 août 2002, ces assurances ont été données.

Parmi les documents jugés utiles à la procédure allemande figurent les pièces, relatives aux comptes n° 1 à 4 (classeur désigné sous la rubrique "Pièces remises par le Luxembourg"), dont l'autorité requérante a demandé la remise, le 23 septembre 2002.

Le 10 juillet 2003, l'Office fédéral a notifié aux mandataires de R.________, de I.________, de H.________ et de P.________, sa décision du 20 août 2002, en les invitant à se déterminer sur une éventuelle remise simplifiée des documents les concernant, ce à quoi elles se sont opposées, le 4 août 2003.

Le...

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