Arrêt nº 4C.187/2003 de Ire Cour de Droit Civil, 21 novembre 2003

Conférencierpublié
Date de Résolution21 novembre 2003
SourceIre Cour de Droit Civil

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Chapeau

130 III 136

19. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile dans la cause A. contre B. (recours en réforme)

4C.187/2003 du 21 novembre 2003

Faits à partir de page 137

BGE 130 III 136 S. 137

  1. A., citoyen hollandais domicilié à Monaco et propriétaire d'un immeuble à Gstaad, est le père de deux filles nées respectivement en 1994 et en 1996. Elles sont issues d'une liaison avec une ressortissante espagnole, née à Genève et domiciliée à Z. (Espagne).

    Le 21 août 1998, la mère des enfants a déposé plainte auprès de la police de son quartier en dénonçant le fait que leur père les avait enlevés, ce qui a donné lieu à une procédure pénale confiée à la Juge d'instruction B., en fonction à Z. Le 2 mai 2000, cette dernière a émis un mandat d'arrêt international à l'encontre de A.

    Le 21 septembre 2000, celui-ci a été arrêté à la frontière de Bardonnex, Genève, et placé en détention extraditionnelle jusqu'au 8 décembre 2000, date de sa libération par la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral, moyennant le dépôt d'une caution de 1 million de francs et un contrôle de présence. A. a néanmoins quitté la Suisse et s'est rendu à Monaco, où ses deux filles sont scolarisées.

  2. a recouru contre l'ordonnance d'écrou du Juge d'instruction de Z., du 25 septembre 2000, devant la Cour d'appel de Malaga, qui a rejeté le recours le 20 avril 2001.

    ParBGE 130 III 136 S. 138

    arrêt du 2 avril 2001, le Tribunal fédéral a écarté un recours de droit administratif contre la décision d'extradition de A. à l'Espagne, prise le 10 janvier 2001 par l'Office fédéral de la justice.

    Le 26 juin 2001, A. a requis du Conseil général du pouvoir judiciaire espagnol une procédure disciplinaire contre deux juges du Tribunal de Z., dont B. Le 18 décembre 2001, la procédure a été classée sans suite, décision communiquée à B. le 5 mars 2002.

  3. Le 9 juillet 2001, A. a ouvert action devant le Tribunal de première instance de Genève contre B. en paiement de 15'800 fr. à titre d'indemnité pour les 79 jours de détention extraditionnelle subis, à raison de 200 fr. par jour. Il a reproché, en substance, à la juge espagnole d'avoir décerné contre lui un mandat d'arrêt international en violation de la loi. B. a contesté sa légitimation passive et soulevé des exceptions d'incompétence ratione loci et materiae. Elle a invoqué le bénéfice de l'immunité de juridiction. Par jugement du 7 novembre 2002, le tribunal s'est déclaré compétent, à raison de la matière, pour connaître de l'action susmentionnée.

    Saisie d'un appel de B., la Cour de justice a annulé le jugement entrepris et déclaré irrecevable l'action introduite par A., par arrêt du 16 mai 2003. Elle a retenu principalement que la Convention de Lugano (CL; RS 0.275.11) ne s'appliquait pas aux actions en responsabilité ouvertes contre un magistrat ou un fonctionnaire, qui relèvent du droit public, ce qui est le cas à Genève. Il en allait de même en Espagne, selon les art. 411 et 412 de la loi espagnole d'organisation judiciaire. Le droit public obéissant avant tout au principe de la territorialité, les tribunaux genevois ne sauraient se prononcer sur d'éventuels manquements imputables au juge d'instruction de Z. La règle de renvoi de l'art. 133 LDIP à la loi du pays où s'est produit de manière prévisible le dommage causé par l'acte illicite (Suisse, Genève) n'entrait pas en ligne de compte au profit du droit espagnol, à teneur de l'art. 413 ch. 1 de la loi d'organisation judiciaire de ce pays. Enfin, comme la procédure pénale était encore pendante, l'action en responsabilité était de toute manière prématurée.

  4. Parallèlement à un recours de droit public, qui a été déclaré irrecevable par arrêt séparé de ce jour, A. dépose un recours en réforme. Il conclut à l'annulation de l'arrêt de la Cour de justice et au renvoi du dossier à cette autorité pour nouvelle décision.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours en réforme.

    Extrait des considérants:

    ExtraitBGE 130 III 136 S. 139

    des considérants:

    1.

    1.1 La Cour de justice a statué que l'action intentée par le demandeur était irrecevable devant les juridictions genevoises pour cause d'incompétences locale et matérielle, en application de la CL, subsidiairement de l'art. 133 LDIP. S'agissant de normes de droit fédéral sur la compétence, qui incluent d'ailleurs les règles sur l'immunité de juridiction reconnue aux Etats étrangers, susceptibles d'entrer aussi en ligne de compte dans le cas particulier (ATF 124 III 382 consid. 2a in fine p. 386 et les arrêts cités), leur violation peut donc donner lieu à un recours en réforme (art. 43 al. 1 OJ).

    Déniant la compétence locale et matérielle des juridictions genevoises, la cour cantonale a exclu définitivement que la même action puisse être introduite entre les mêmes parties devant les tribunaux de ce canton, rendant par-là une décision finale, qui est à ce titre sujette à recours (ATF 115 II 237 consid. 1b; BERNARD CORBOZ, Le recours en réforme au Tribunal fédéral, in SJ 2000 II p. 11). A l'inverse d'ailleurs, si la cour cantonale avait admis la compétence des tribunaux genevois, il se fût agi d'une décision incidente sur la compétence (ATF 126 III 327 consid. 1c et les références), également susceptible d'un recours en réforme immédiat (art. 49 al. 1 et art. 48 al. 3 OJ).

    1.2 Dans un recours en réforme, qui ne doit pas être confondu avec un recours cassatoire, le recourant ne doit pas se borner à demander l'annulation de la décision attaquée, mais il doit également, en principe, prendre des conclusions sur le fond du litige; il n'est fait exception à cette règle que lorsque le Tribunal fédéral, en cas d'admission du recours, ne serait de toute manière pas en situation de statuer lui-même sur le fond et ne pourrait que renvoyer la cause à l'autorité cantonale (ATF 125 III 412 consid. 1b; ATF 111 II 384 consid. 1; ATF 106 II 201 consid. 1). En l'espèce, les constatations cantonales sont insuffisantes pour permettre au Tribunal fédéral de statuer lui-même sur le fond de l'action en responsabilité, que la cour cantonale n'a pas abordé. Dans ces conditions, les conclusions formulées par le demandeur sont admissibles.

    1.3 Eu égard à la valeur litigieuse, de 15'800 fr., le recours en réforme est en principe recevable puisqu'il dépasse le seuil de 8'000 fr. BGE 130 III 136 S. 140

    fixé à l'art. 46 OJ; de plus, il a été formé en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et dans les formes requises (art. 55 OJ).

    1.4 Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il faille rectifier des constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ).

    Dans la mesure où la partie recourante présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte. Il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours en réforme n'est donc pas ouvert pour se plaindre de l'appréciation des preuves et des constatations de fait qui en découlent.

    Dans son examen du recours, le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties, lesquelles ne peuvent en prendre de nouvelles (art. 55 al. 1 let. b OJ); en revanche, il...

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