Arrêt nº 4A 515/2010 de Ire Cour de Droit Civil, 30 août 2011

Date de Résolution30 août 2011
SourceIre Cour de Droit Civil

Text Publié

Chapeau

137 III 453

67. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans les causes jointes A.X. et B.X. contre Banque Z. (recours en matière civile)

4A_513/2010 / 4A_515/2010 du 30 août 2011

Regeste

Taux de l'intérêt moratoire (art. 104 al. 2 CO). Si la dette portait déjà intérêt avant la demeure à un taux supérieur au taux légal de 5 %, c'est le taux conventionnel qui s'applique à titre de taux de l'intérêt moratoire (clarification de la jurisprudence; consid. 5.1).

Considérants à partir de page 454

BGE 137 III 453 S. 454

Extrait des considérants:

5. (...)

5.1 S'agissant du taux de l'intérêt moratoire, les recourants, se fondant sur l'arrêt rendu le 9 septembre 2004 dans la cause 4C.131/2004 et publié partiellement aux ATF 130 III 694, soutiennent que la cour cantonale aurait dû appliquer le taux légal de 5 % l'an, faute d'un accord des parties quant au taux applicable après la dénonciation des crédits ou pour maintenir ultérieurement les taux d'intérêt stipulés dans les contrats résiliés.

Aux termes de l'art. 104 CO, le débiteur qui est en demeure pour le paiement d'une somme d'argent doit l'intérêt moratoire à 5 % l'an, même si un taux inférieur avait été fixé pour l'intérêt conventionnel (al. 1). Si le contrat stipule, directement ou sous la forme d'une provision de banque périodique, un intérêt supérieur à 5 %, cet intérêt plus élevé peut également être exigé du débiteur en demeure (al. 2). Le texte du deuxième alinéa de la disposition citée est clair et ne souffre aucune interprétation qui s'en écarterait: si la dette portait déjà intérêt avant la demeure à un taux supérieur au taux légal, c'est ce taux conventionnel qui s'applique à titre de taux de l'intérêt moratoire (ATF 130 III 312 consid. 7.1 p. 319 confirmé par l'arrêt 4A_204/ 2009 du 10 septembre 2009 consid. 2; cf., parmi d'autres: WOLFGANG WIEGAND, in Commentaire bâlois, Obligationenrecht, vol. I, 4e éd. 2007, n° 7 ad art. 104 CO; GAUCH/SCHLUEP/SCHMID/EMMENEGGER, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, vol. II, 9e éd. 2008, n° 2690; LUC THÉVENOZ, in Commentaire romand, Code des obligations, vol. I, 2003, n° 14 ad art. 104 CO; STÉPHANE SPAHR, L'intérêt moratoire, conséquence de la demeure, Revue valaisanne de jurisprudence [RVJ] 1990 p. 351 ss, 366). Le débiteur ne doit, en effet, pas pouvoir profiter de conditions plus favorables que celles qu'il a acceptées en concluant le contrat, du seul fait qu'il est en demeure (jugement du Tribunal cantonal valaisan du 7 septembre 1995, in RVJ 1996 p. 286 ss, 290). L'arrêt fédéral invoqué par les recourants traite essentiellement de l'interdiction de l'anatocisme en liaison avec la résiliation d'un contrat de compte courant, problème qui n'est pas d'actualité en l'espèce dès lors que les premiers juges n'ont pas procédé à une composition de l'intérêt moratoire (sur cette figure BGE 137 III 453 S. 455

juridique, cf. THÉVENOZ, op. cit., n° 6 ad art. 105 CO). Vrai est-il, toutefois, que, dans un passage non publié de ce précédent, il a été jugé qu'il convenait d'appliquer le taux légal de 5 %, étant donné qu'aucune disposition des conditions générales et spéciales de la banque "ne précis[ait] le taux d'intérêt valable après la résiliation du contrat" (arrêt 4C.131/2004, précité, consid. 4; préposition mise en évidence par la Cour de céans). Dans la mesure où elle paraît avoir voulu exclure, ce faisant, la possibilité d'appliquer au débiteur en demeure le taux fixé pour l'intérêt conventionnel, la Ire Cour civile s'est écartée de l'opinion qu'elle avait émise dans un arrêt rendu quelques mois auparavant (ATF 130 III 312, précité), qui a été confirmé par la suite (arrêt 4A_204/2009, susmentionné), et a exprimé un avis qui n'est pas compatible avec le texte même de l'art. 104 al. 2 CO, comme l'ont souligné les commentateurs de l'arrêt en question (DANIEL SCHWANDER, in Pra 2005 n° 64 p. 497; CORINNE ZELLWEGER-GUTKNECHT, in Aktuelle Rechtsprobleme des Finanz- und Börsenplatzes Schweiz, 12/2004 p. 203). Aussi les recourants ne sauraient-ils s'appuyer sur ce précédent pour réclamer l'application du taux légal de 5 %.

Dès lors, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en portant en compte, au titre de l'intérêt moratoire, les taux arrêtés d'un commun accord par l'intimée et chacun des recourants pour la rémunération des différents crédits que la première avait octroyés aux seconds.

Text Original

4A_515/2010 (30.08.2011) Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

{T 0/2}

4A_513/2010, 4A_515/2010

Arrêt du 30 août 2011

Ire Cour de droit civil

Composition

Mmes et MM. les Juges Klett, présidente, Corboz, Rottenberg Liatowitsch, Kolly et Kiss.

Greffier: M. Carruzzo.

Participants à la procédure

4A_513/2010

A.X.________, représenté par Me Jacques Michod,

recourant,

contre

Banque Z.________,

représentée par Me Jean-Samuel Leuba,

intimée.

et

4A_515/2010

B.X.________, représenté par Me François Besse,

recourant,

contre

Banque Z.________,

représentée par Me Jean-Samuel Leuba,

intimée.

Objet

prêts bancaires; cédules hypothécaires, responsabilité de la banque dispensatrice de crédits,

recours en matière civile contre le jugement rendu le

13 juillet 2010 par la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Faits:

A.

A.a B.X.________, né en 1947, et A.X.________, né en 1952, tous deux agriculteurs et viticulteurs à ..., sont les fils de X.________, qui était propriétaire d'un important domaine agricole constitué de plusieurs parcelles situées notamment à ... et à ....

En 1983, X.________ a donné à chacun de ses deux fils, en copropriété pour une demie, plusieurs parcelles sises sur les territoires desdites communes. Deux d'entre elles - les nos 1 et 2 de la commune de ... - ont une surface, respectivement, de 3'580 m2 et de 39'320 m2. Il n'est pas établi qu'à la suite de cette donation, les frères A.X.________ et B.X.________ se seraient comportés plus comme des promoteurs immobiliers qu'en qualité de paysans vivant de la culture de leur domaine.

Le 23 mars 1989, B.X.________ et A.X.________ ont constitué une cédule hypothécaire au porteur, grevant en premier rang la parcelle n° 1, pour un montant de 2'000'000 fr. dont ils sont solidairement débiteurs (n° zzz).

A.b Depuis 1977 au moins, B.X.________ et A.X.________ ont été en relations d'affaires avec la Banque Z.________ (ci-après: la Banque).

Au début des années 1990, A.X.________, qui désirait développer un projet agricole et immobilier au Portugal, et B.X.________, qui entendait se lancer dans un projet immobilier en Espagne, se sont adressés à la Banque en vue d'obtenir un crédit destiné à financer leurs projets. Ils ne l'ont toutefois pas sollicitée pour leur donner des conseils au sujet de ceux-ci et ne l'ont jamais associée aux discussions et tractations y relatives.

A l'époque, la fortune et le revenu annuel imposables des prénommés étaient, respectivement, de 401'000 fr. et de 106'400 fr. pour A.X.________, de 331'000 fr. et de 101'400 fr. pour B.X.________.

Le 31 mai 1990, la Banque a octroyé à chacun des deux frères A.X.________ et B.X.________ un crédit en compte courant de 6'000'000 fr., sans amortissement, avec intérêts à 8,5% l'an et commission trimestrielle de 0,25% sur le solde débiteur le plus élevé. A titre de garantie, chaque emprunteur a cédé en propriété à la Banque une cédule hypothécaire au porteur de 6'000'000 fr. en premier rang grevant sa quote-part d'une demie de la parcelle n° 2 (cédule n° xxx pour B.X.________ et cédule n° yyy pour A.X.________), les deux cédules ayant été constituées le 9 février 1990.

Le 26 juillet 1990, la Banque a augmenté la ligne de crédit consentie aux frères A.X.________ et B.X.________ de 6'000'000 fr. à 7'500'000 fr. La moitié de cette somme faisait l'objet d'une avance à terme fixe, la limite du crédit en compte courant étant ramenée à 3'750'000 fr., sans amortissement, avec intérêts échelonnés de 8,5 à 9% et commission trimestrielle de 0,25% sur le solde débiteur le plus élevé. Afin de garantir cette augmentation de crédit, les deux emprunteurs ont cédé en propriété à la Banque la cédule hypothécaire au porteur de 2'000'000 fr. qu'ils avaient constituée sur la parcelle n° 1.

A.c A.X.________ a développé des activités agricoles au Portugal entre 1991 et 1994. Par lettre du 14 mai 1992, il a indiqué à la Banque que les montants empruntés avaient servi "au montage complet d'un projet de haute qualité au Portugal comprenant appartements, hôtels, tennis, piscines et golf". Cependant, alléguant que la mise en oeuvre de ce projet avait pris du retard pour des raisons d'ordre administratif,

il sollicitait une rallonge de crédits en précisant que l'affaire devrait vraisemblablement se conclure dans le courant de l'hiver prochain et qu'il avait donné oralement la priorité d'achat à l'un des grands groupes internationaux de vacances.

Prenant acte de ces explications, la Banque a fixé à A.X.________ un délai au 15 août 1992 pour régulariser la situation et lui verser la somme de 160'562 fr. correspondant au dépassement de la limite de son compte courant. Elle l'a relancé, par courriers des 27 octobre et 20 novembre 1992, pour des dépassements de 95'854 fr. et de 96'104 fr.

Le 9 octobre 1992, la Banque a écrit à chacun des deux frères A.X.________ et B.X.________ pour les informer qu'elle consentait à renouveler jusqu'au 26 février 1993 l'avance à terme fixe de 3'750'000 fr., au taux de 8,7/8% l'an, échue le 26 août 1992. A la date du 16 février 1993, cette avance présentait un solde débiteur de 3'916'406 fr. 25 pour l'un et l'autre emprunteur. Par courrier du 2 juin 1993, la Banque a accepté d'en prolonger une dernière fois l'échéance jusqu'au 26 octobre 1993, au taux de 6,5% l'an, pour autant que les intérêts échus, totalisant 886'849 fr. 50, fussent intégralement payés avant le 30 juin de la même année.

Le 29 octobre 1993, A.X.________ a déposé plainte pénale, à Genève, contre l'administrateur de la société qui lui avait vendu les terrains...

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