Arrêt nº 4A 613/2009 de Ire Cour de Droit Civil, 2 juillet 2010

Date de Résolution 2 juillet 2010
SourceIre Cour de Droit Civil

Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

{T 0/2}

4A_613/2009

Arrêt du 2 juillet 2010

Ire Cour de droit civil

Composition

Mme et MM. les Juges Klett, Présidente, Corboz et Kolly.

Greffière: Mme Godat Zimmermann.

Participants à la procédure

X.________ Ltd, représentée par

Me Stéphane Boillat,

recourante,

contre

Y.________ SA, représentée par

Me Regina Natsch,

intimée.

Objet

contrat de représentation exclusive; résiliation; droit japonais,

recours contre le jugement de la 2ème Chambre civile de la Cour d'appel du canton de Berne du 29 octobre 2009.

Faits:

A.

Fondée en 1935 sous le nom U.________ SA, V.________SA (ci-après: V.________), dont le siège est à ... (Suisse), est spécialisée dans la fabrication et la vente de produits horlogers, en particulier à l'étranger. Pour ce faire, elle a développé un système de distribution dans le monde entier et s'est assuré la collaboration d'agents et de représentants exclusifs. Depuis les années 1980, A.________ était le directeur de V.________; il en deviendra par la suite le Président du Conseil d'administration.

X.________ Ltd (ci-après: X.________) a son siège à Tokyo. Elle a notamment pour but l'importation d'articles divers; l'un de ses administrateurs est B.________.

Dès les années 1980, V.________, représentée par A.________, et X.________, représentée par B.________, ont réalisé ensemble des affaires ponctuelles. En 1990, l'entreprise de ... a relancé la production de montres-bracelets, parallèlement à celle de son produit-phare, les compteurs. Comme le distributeur exclusif de V.________ au Japon n'était pas intéressé par les montres-bracelets, X.________ s'est lancée, à partir de 1994, dans la vente du produit dans ce pays jusqu'à en faire l'une de ses principales activités; en 2000, la distribution des produits V.________ représentait 80 % du chiffre d'affaires de X.________. La collaboration entre les parties est alors devenue très étroite et s'est caractérisée par une correspondance régulière et abondante. Un nombre important de commandes donnait lieu à discussion, parce qu'elles portaient sur des produits fabriqués en fonction des spécifications indiquées par X.________ ou que les montres étaient livrées en private label, c'est-à-dire avec la marque du client de la société japonaise. Grâce à l'implication de X.________, le montant annuel des ventes de montres V.________ au Japon a passé de 6'900'000 yens environ en 1995 à 32'600'000 yens environ en 2000, soit une augmentation de près de 500 % sur cinq ans. Par ailleurs, au fil des années, un lien d'amitié s'est noué entre A.________ et B.________.

Les relations entre les deux sociétés se sont également enrichies d'échanges de services. Ainsi, en 2000, V.________ ne parvenait plus à se procurer des aiguilles de montre de qualité suffisante et B.________ lui a trouvé un fabricant d'aiguilles au Japon. En outre, A.________ ayant parlé à B.________ de son souhait de trouver de nouveaux débouchés pour V.________ en Asie, le représentant de X.________ lui a communiqué les noms d'agents potentiels à Singapour et à Hong Kong.

Le 3 novembre 2000, la totalité du capital-actions de V.________ a été vendue à W.________ SA. Des dissensions ont rapidement surgi entre A.________ et les nouveaux organes de V.________ désignés par l'acheteuse, en particulier C.________, directeur et président du conseil d'administration. Alors qu'il devait rester au service de V.________ en qualité d'employé, A.________ a été licencié avec effet immédiat à mi-janvier 2001. A ce moment-là, il n'avait pas encore pu mettre les nouveaux organes de V.________ au courant de tous les aspects commerciaux et techniques des affaires de la société. Il a ainsi été difficile pour la nouvelle direction d'acquérir une vue d'ensemble de la situation de l'entreprise, notamment en ce qui concerne les fournisseurs, les clients et les commandes en cours.

Le 16 janvier 2001, B.________ a envoyé un fax à V.________ pour s'enquérir de la suite de leur collaboration, en précisant qu'il souhaitait maintenir les relations commerciales avec les nouveaux propriétaires. Le 23 janvier 2001, il a fait parvenir à V.________ une facture faisant état de 120 heures de travail en 2000, notamment pour la recherche d'agents à Hong Kong et à Singapour. Deux jours plus tard, il a manifesté, par fax, son impatience en raison de l'absence de livraison de 35 montres commandées entre le 30 octobre 2000 et le 4 janvier 2001; il s'est également plaint d'un manque de communication. A ce moment-là, les commandes en cours de X.________ auprès de V.________ s'élevaient à 100'000 fr.

Par courriel du 26 janvier 2001, D.________, responsable de V.________ en charge des contacts commerciaux en anglais, a répondu que la société regrettait infiniment que X.________ soit confrontée à des difficultés en raison de sa propre situation critique. V.________ a déclaré à cette occasion qu'elle pourrait livrer la semaine suivante 9 montres commandées en 2001 et que le solde, commandé en 2000, suivrait dès que la production le permettrait. De ce courriel, il ressort également que B.________ avait été précédemment informé par téléphone de la situation délicate de V.________ et du fait que la société ne pouvait pas confirmer les dates de livraison des commandes avant d'avoir procédé à un inventaire des composants et des produits terminés.

Le 29 janvier 2001, B.________ a remercié V.________ de ces informations et réclamé l'envoi immédiat des montres disponibles.

Le même jour, C.________ a adressé une lettre-circulaire à environ 30 destinataires, dont X.________. Il y exposait les projets de la société et leur influence sur ses relations avec les clients. Il relevait que, selon les études effectuées par la nouvelle équipe, V.________ vendait ses montres à perte depuis plusieurs années et que le risque financier ainsi encouru l'empêchait de continuer la production. Se devant de communiquer cet état de fait aux clients, C.________ précisait que V.________ était en train de procéder à une restructuration totale, y compris au niveau du réseau de distribution, de sorte qu'elle se trouvait dans un cas de nécessité absolue qui l'empêchait de continuer à honorer les commandes passées. Le directeur de V.________ insistait enfin sur le caractère impératif de la négociation de nouvelles conditions en vue d'une coopération future et sur l'importance de trouver un accord aussi rapidement que possible afin de pouvoir reprendre les livraisons à mutuelle satisfaction.

Le 1er février 2001, X.________ a envoyé un rappel à propos des 9 montres dont la livraison avait été promise dans le courriel du 26 janvier. Le jour même, V.________ lui a expédié 13 montres ainsi que diverses pièces.

Le 4 février 2001, B.________ a adressé un courrier au représentant du distributeur de V.________ aux États-Unis. Il y critiquait la lettre-circulaire du 29 janvier 2001 et incitait le représentant à refuser, comme lui, de négocier avec la société suisse. Il ajoutait être certain que, dans ce cas, V.________ mettrait fin aux relations contractuelles et que, même s'ils acceptaient les nouveaux prix, elle refuserait toute livraison. En conclusion, B.________ entendait obtenir de V.________ qu'elle respecte ses engagements, au besoin par la voie judiciaire.

Par fax du 22 février 2001, V.________ a accusé réception de la facture de X.________ du 23 janvier 2001 relative à des activités de consulting. Ne disposant d'aucun élément pour juger de son bien-fondé, elle a demandé à X.________ des informations supplémentaires. Par la même occasion, elle a réclamé à la société japonaise le paiement de 76'360 fr. correspondant au solde dû à la suite de diverses livraisons.

Le 13 mars 2001, V.________ a adressé un fax à B.________, notamment pour l'inviter à venir discuter de la collaboration future avec...

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